Un autre chef de la guérilla colombienne tué par ses hommes

En Colombie, quatre guérilleros de l'Armée de libération nationale (ELN) ont tué leur chef avant de se rendre aux autorités pour intégrer le programme de démobilisation et de réintégration* proposé par le gouvernement à tous les combattants abandonnant la lutte armée. L'ELN est un mouvement révolutionnaire de tendance castriste et chrétienne créé en 1964 par Fabio Vásquez Castaño. À partir de 1969 et jusqu'à sa mort en février 1998, c'est le père Manuel Perez qui a dirigé l'ELN et c''est durant cette période que le mouvement rebelle a gagné en dureté et intransigeance, refusant tout pourparler avec le gouvernement.

L'ELN s'est spécialisé dans le trafic de drogue, les attaques de banques, les assassinats et les enlèvements, mais s'est tristement rendu célèbre par les attentats répétés contre l'oléoduc de la compagnie pétrolière nationale ECOPETROL qui a refusé de verser l'impôt révolutionnaire. L'ELN s'en prend aussi régulièrement aux ouvriers et ingénieurs de cette compagnie, et les enlèvements avec demande de rançon sont hélas fréquents.

Si l'ELN était le principal mouvement de guérilla en Colombie dans les années 60, sous les assauts de l'armée colombienne et de la guérilla rivale des FARC, il a nettement perdu en influence même si l'on estime encore à près de 5.000 hommes le nombre de ses combattants.

Ainsi, les quatre guérilleros dont nous parlions au début de cet article ont révélé aux médias locaux qu'ils avaient pris la décision de déserter à cause des problèmes d'alimentation et de santé, des mauvais traitements que leur infligeait leur chef et de la pression exercée par les forces gouvernementales les pourchassant. Le pire, ont avoué les guérilleros, c'est la perte de toute idéologie révolutionnaire qui est source de nombreuses dissensions au sein de l'ELN.

Les quatre déserteurs ont raconté que pendant leur fuite, ils avaient été pris en chasse par leurs compagnons d'armes. Grâce à leurs chiens, ces derniers avaient pu localiser les fuyards qui ont été obligés de se défendre et d'ouvrir le feu. C'est lors de cet affrontement qu'ils auraient abattu leur commandant et mis en fuite les autres guérilleros. Les déserteurs se seraient ensuite débarrassés du corps de leur chef en le jetant dans une rivière.

Un cas similaire de guérilleros tuant leur commandant s'est déjà produit, mais au sein de l'autre groupe terroriste, celui des forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC). Cependant, cette fois-là, les guérilleros qui avaient tué leur chef lui avaient coupé la main pour conserver une preuve et ainsi pouvoir réclamer la récompense offerte par le gouvernement.

Pas de doute, les mouvements rebelles colombiens sont aux abois, ce qui est de bon augure pour le retour de la paix et de la démocratie sur l'ensemble du territoire.

* Le programme de démobilisation et de réintégration a été mis en place en Colombie dès 1994 et a été renforcé depuis lors par de nombreux décrets, principalement sous la présidence du gouvernement Uribe qui a fait du désarmement de tous les terroristes un des objectifs prioritaires de sa politique. Ce programme, comme le précisent les lois, oblige le gouvernement national à mettre en place les mécanismes permettant aux déserteurs des groupes rebelles de créer un nouveau projet de vie sociale dans la dignité et le respect de leur liberté politique et juridique (avec quelques exceptions prévues pour ceux reconnus coupables de crimes atroces). En ce qui concerne les mineurs démobilisés, le gouvernement s'engage à tout faire pour leur permettre de recouvrer la vie normale d'un enfant de leur âge en ce compris une aide sociale, psychologique et scolaire.

C'est grâce à ce programme que le nombre de déserteurs, tant de l'ELN, des FARC ou des paramilitaires, s'élève à plusieurs milliers de combattants.