Des lamas gardiens de moutons !

 

Un journal Suisse, La Tribune de Genève a choisi de mettre à l’honneur les lamas qui gardent des troupeaux de moutons et tire les conséquences de quelques expériences dans les Alpages suisses… En France aussi, même si les tentatives sont rares, le phénomène semble bien connu et on s’interroge aussi : est-ce « la solution » contre les prédateurs qui s’attaquent aux ovins en montagne, les renards, les chiens errants et autres loups ?

 

Pourquoi des lamas ?

Le lama est « un camélidé », le plus grand des plus petits, semble-t-il. Sa taille au garrot est de 100 à 125 cm. Il pèse entre 100 et 120 kg. Il y a plusieurs types de lamas selon leur variété de laine. On les classe en plusieurs catégories (classique, wooly, silky, suri, moyennement lainé). On les utilise pour la randonnée, pour leur compagnie, la laine, le débroussaillage, la zoothérapie et le gardiennage des troupeaux.

Sur ce dernier usage, précisons que le lama a l’instinct de tenir à distance du troupeau les prédateurs. Lorsque des animaux s’approchent des brebis (chiens, renards ou puma dans la cordillère des Andes), ils les effraient notamment en poussant des cris aigus et par leur taille et leur poids… les pourchassent et s’interposent entre les moutons et les prédateurs ! Ils se présentent le cou en avant, prêts à ruer… posture dissuasive sur les attaquants.

Le lama doit d’abord être dressé pour faire sien le troupeau. Il ne remplace pas le berger, mais le prévient en criant en cas d’intrusion dangereuse ! A n’en pas douter, il possède des qualités naturelles pour cette fonction. Encore faut-il que l’éleveur le forme et le prépare à cet usage ! Il vaut mieux, en principe, commencer à introduire un jeune lama dans le troupeau (10 à 12 mois). C’est un éleveur spécialisé qui procède au dressage sur place avec le berger à ses côtés en donnant des  instructions…

Les lamas sont attentifs et curieux.  Leur comportement territorial est semblable à celui des ânes et des chiens de protection. Selon un éleveur suisse « en plus, ils présentent certains atouts. Par rapport aux chiens, ils nécessitent moins de travail car ils pâturent avec le troupeau. Ils respectent d’ailleurs bien les clôtures. Et surtout, le potentiel de conflit avec les promeneurs est bien moindre qu’avec un chien de protection».

Si le lama présente naturellement des qualités pour le gardiennage, il peut poser quelques petits problèmes, tous ne devenant pas de parfaits « gardiens » ! A Grasse, par exemple un berger a fait l’essai d’un lama l’an dernier, l’été… sur un troupeau de 350 brebis et il n’a pas empêché le loup de s’emparer d’une brebis blessée… Les moutons affolés se sont séparés en plusieurs groupes sur les pentes de la montagne et le pauvre lama n’a pas pu se départager !

On voit que si le lama semble présenter des qualités indéniables pour un rôle de gardien de troupeau, encore faut-il qu’il soit élevé et dressé par des éleveurs professionnels, qui sont encore rares en Europe.

 

Quelques expériences seulement, en Europe

Ce n’est pas nouveau. Comme on le sait, le lama est un animal mythique dans l’histoire des civilisations andines et occupe toujours une place de choix dans le cœur des habitants de l’altiplano. Son rôle de gardien remonte loin dans le temps… Aux Etats-Unis, il y a longtemps aussi qu’on utilise des lamas pour protéger les troupeaux des coyotes et des chiens errants, ainsi qu’au Canada.

En Europe, à part en Angleterre, on balbutie et on note quelques expériences seulement dans les alpages Suisses et Français, ainsi que dans les Pyrénées.

En France, il existe une association, l’AFLA (Association Française Lamas et Alpagas) qui regroupe les éleveurs et propriétaires, environ 200)…

Le lama est efficace mais dans certaines conditions

La grande question est de savoir si le lama est efficace dans son rôle de gardien ? Si on en croit quelques témoignages comme celui de Matthieu Müller, ingénieur agronome responsable chez AGRIDEA à Lausanne de la production caprine et ovine, qui a introduit un lama dans son troupeau à Leysin, il y a un peu plus d’un an comme gardien, le bilan est positif. Il n’y a pas de conflit avec les chiens. Tout se passe bien, mais il souligne que la pression « des prédateurs » est faible pour le moment. Pour que le lama soit efficace il faut aussi que le troupeau ne soit pas trop grand, ni le terrain trop étendu.

Autre témoignage d’un éleveur du Puy de Dôme qui cite un de ses clients bergers :  « Depuis que j’ai votre lama, j’ai un taux de réussite de plus de 100% contre la mortalité des agneaux due aux renards ; non seulement je n’ai plus d’égorgement d’agneaux la nuit (il en avait une cinquantaine par an) mais je retrouve maintenant les agneaux morts naturellement, intacts sur le site».

Cet éleveur cite également « le cas d’un lama qui s’est affronté à une attaque d’une fratrie de six rottweilers affamés, combat qui aurait pu lui coûter la vie mais qu’il a assumé avant l’intervention de l’homme (ce qui lui a valu une décoration par 30 millions d’amis pour cet acte de bravoure de lama gardien).

Ce n’est pas tout ! Le lama peut rendre d’autres services, plus efficace qu’un chien, il signale « les moutons qui quittent le troupeau » par des gloussements… En plus, il ne coûte pas cher et ne mord pas les promeneurs ! Il doit être seul. Il ne faut pas lui associer un autre congénère, car il ne s’intéresse plus aux moutons ! Avec des chèvres, çà ne marche pas non plus… Il leur fait peur.

 

Le lama peut-il être une alternative à la protection des troupeaux contre les prédateurs ?

Les lamas ont l’avantage de vivre plus longtemps que les chiens de bergers (25 ans contre) et leur formation coûterait moins cher. Après 7 ans de services les chiens sont moins efficaces… A noter toutefois que le lama n’est pas capable de conduire  un troupeau comme un chien, mais il peut cohabiter.

Comme on le voit, cette solution du lama gardien de troupeau est encore très peu pratiquée dans une partie de l’Europe et surtout en France. Nous en sommes à peine au niveau expérimental. Si ces essais sont satisfaisant, on peut penser que la pratique se développera un peu, sans toutefois constituer la solution majeure à la protection des troupeaux en montagne contre les loups et autres prédateurs !

La vrai question qui reste posée est « un choix de société ». Devons-nous accepter la cohabitation avec les grands prédateurs (loups, ours etc…) dans nos pays ? On sait qu’il y a des pour et des contres et que, pour l’instant, en France, les grands prédateurs sont protégés malgré les dégâts causés aux troupeaux. Cet état de fait, commence à dissuader certains bergers de poursuivre leurs activités dans  les alpages et ils jettent l’éponge… des régions redeviennent sauvages au profit des grands prédateurs !

Il reste toutefois à rechercher des mesures de protection indispensables aujourd’hui pour les troupeaux. La solution du lama peut, dans certains cas, pour des petits troupeaux se révéler satisfaisante.

Mais pas sûr qu’on verra les lamas proliférer dans nos montagnes et nos alpages. Cependant, restons optimistes, leur utilisation progressera, certainement…

Sources Le Matin, La Tribune de Genève, lamas-alpagas.org,

(Photo : capture d’image sur le site lematin.fr)