Personal Shopper

Réalisateur : Olivier Assayas

Date de sortie : 14 décembre 2016

Pays : France

Genre : Thriller

Durée : 105 minutes

Budget : 5,6 millions de dollars

Casting : Kirsten Stewart (Maureen), Sigrid Bouaziz (Lara), Lars Eidinger (Ingo), Nora Von Waldstatten (Kyra)

Maureen est une jeune américaine, elle vit à Paris depuis la mort de son frère jumeau d’une maladie cardiaque. Elle y est « en attendant », espérant un signe de son frère medium tout comme elle, fruit d’une promesse qu’ils s’étaient faite. Elle attend mais rien à l’horizon. Pour passer le temps et subsister à ses besoins, elle est personal shopper pour une mannequin caractérielle, un job qu’elle déteste. Lors d’un trajet à Londres pour récupérer une robe, elle reçoit d’étranges sms,. Qui peut bien la contacter ? Serait-ce son frère ?

Personal Shopper est la deuxième collaboration entre Olivier Assayas et Kirsten Stewart après Sils Maria porté par Juliette Binoche, il y a 3 ans. 2016 fut une année faste pour Kirsten, elle a brillé dans Café Society de Woody Allen et elle continue de déployer son talent dans le film d’Assayas. Progressivement, elle s’affirme comme une grande actrice, arrivant à décoller l’étiquette de star de blockbusters pour adolescents pré pubères avec vampires luisants et loup-garous glabres, pour s’imposer dans des films plus intimistes et moins grand public. Une métamorphose qu’elle a su opérer, au contraire d’autres acteurs qui ont du mal à percer. Le film comporte peu de personnages, l’intrigue étant essentiellement centrée sur Maureen. Il fallait savoir habiter l’écran, le dominer et elle y arrive avec un charisme assuré. Troublée, perturbée, passant sans cesse sa main dans ses cheveux pour manifester un mal aise, un poil masochiste, fonctionnant par la peur. Elle est focalisée sur la mort de son jumeau, devenue de véritables œillères qui lui font perdre la raison, à l’image des sms qu’elle reçoit et qu’elle lui prête sans chercher une raison moins surnaturelle. Les personnages secondaires sont accessoires mais non dénués d’intérêt, le plus marquant de tous serait le frère décédé dont l’ombre plane sur la totalité de l’oeuvre et est à l’origine de tout, de l’attente, du métier, des doutes, du chagrin de sa soeur et il continue de vivre à travers ses proches, à travers Maureen dont le look androgyne et les vêtements masculins donnent une silhouette ambiguë. Le film est construit sur un paradoxe, Maureen travaille dans le milieu de la mode, consumériste et basé sur l’apparence, tout ce qu’elle rejette. Elle, elle recherche plutôt un refuge dans l’immatériel, le spirituel.

D’entrée de jeu, le film est difficile à prendre en main de part son rythme lent, son manque d’action et une certaine confusion, sur les nombreux allers-retours entre les différentes lieux, une réalisation minimaliste et un étrange procédé pour passer d’une scène à une autre. Un fondu prend l’ensemble de l’écran provoquant une ellipse où nous ne savons pas vraiment quand et où nous sommes. L’instabilité nous guette, Maureen est notre seul repère, cela renforce le lien entre le spectateur et l’actrice. La tension monte et devient palpable dès que le jeu de ping pong des sms commence. Même si un esprit cartésien peu quasi immédiatement connaître l’identité de l’expéditeur des étranges texto, Assayas nous fait espérer que l’irrationnel supplante le rationnel, que l’on se perde avec Maureen, que le fameux signe de son frère soit celui-là pour qu’enfin elle soit en paix avec elle-même. La pression atteint un climax quand derrière la porte de son appartement, l’interlocuteur lui glisse un mot, la musique devient stridante, angoissante, il sait où elle habite, elle est prise au piège. Personal Shopper est plus qu’un thriller, c’est un film marqué par les fantômes et les spiritualistes. Ici, le paranormal transcende les genres, les esprits ne sont pas seulement présent dans le cinéma mais aussi bien dans la peinture d’Hilma Af Klint ou dans la littérature de Victor Hugo. C’est l’occasion pour le film de passer dans une forme de documentaire déguisé aux allures quelque peu absurdes. En même temps que Maureen, nous apprenons que la peintre suédoise est adepte du spiritisme, elle rentre en communication avec l’esprit des « grands », une source d’inspiration pour devenir une pionnière de l’art abstrait. De la même façon, via une vidéo Youtube consultée sur son ordinateur portable, nous pouvons visionner une reconstitution grostesque et cheap avec Benjamin Biolay en illustre romancier faisant tourner les tables à Jersey en compagnie d’autres férus. A cela s’ajoute un petit hôtel particulier sinistre en banlieue parisienne, hantée par l’esprit d’une petite fille de la fin du XIXème siècle pas très contente d’être encore là.

Au final, l’oeuvre d’Assayas est troublante et divise l’opinion, soit on l’adore, soit on la déteste, un peu comme ceux qui croient ou non aux esprits. On se laisse séduire ou non.