Irréprochable

Réalisateur : Sébastien Marnier

Date de sortie : 6 juillet 2016

Pays : France

Genre : Thriller

Durée : 103 minutes

Budget : 2,3 millions d’euros

Casting : Marina Foïs (Constance), Jérémie Elkaïm (Philippe), Joséphine Japy (Audrey), Benjamin Biolay (Gilles)

Constance a 40 ans, agent immobilier au chômage depuis 1 an, elle doit quitter Paris pour retourner chez elle en province. Une place vient de se libérer dans l’agence où elle a débuté plusieurs années auparavant. Toutefois, elle n’est pas seule sur le coup, une jeune fille nommée Audrey, la vingtaine, lui est préférée. Un vrai coup dur pour Constance qui est bien décidée à reprendre ce qui lui était du.

Irréprochable propose un scénario intéressant et prenant malgré des longueurs et des scènes dont l’intérêt reste négligeable. Toutefois, elles ont le mérite de montrer que l’existence de Constance est fade et sans saveur, le chômage occurre de nombreux moments d’ennui et de passe temps «étranges». On n’aura jamais vu autant de fois une personne nue sur du carrelage pour se refroidir et calmer son côté bordeline. La fraîcheur des carreaux comme soupape de décompression. Tout ce temps libre lui permet de fomenter sa vengeance, tranquillement, paisiblement, contre cette pauvre jeune fille qui est juste là au mauvais endroit, au mauvais moment. Tel un prédateur, elle tournoie autour de sa proie, se rapproche, joue la carte de la sympathie, prend contact avec elle, lui conseille de partir rejoindre son amour à Novgorod afin d’éviter le pire, abuse des mensonges, se permet de violer son intimité et de saborder ses bonnes intentions. Une forme de domination perverse se forme rapidement.

Quand on voit Irréprochable, il y a comme étrange impression, comme une influence provenant de Nicolas Winding Refn dans la mise en scène. Tout d’abord dans la façon de faire monter la tension tout en gardant une ambiance lente et angoissante, comme une cocotte minute prête à exploser clôturant les deux intrigues brutalement et sans ménagement. Un moment attendu, prévu, mais qui vu le rythme mollasson, semblait ne plus pouvoir arriver et pourtant! Ça c’est une force scénaristique. Ensuite sur la forme, que ce soit visuellement avec les plans, les cadrages et le choix des couleurs que musicalement avec des pistes electro froides, planantes et inquiétantes composées par le brillant trio parisien Zombi Zombi. Cela fait penser à Drive par moment. Une sensation renforcée quand Constance apparaît filmée de dos, cadrée sur les épaules, une démarche volontaire, troquant le bomber en satin blanc orné d’un scorpion jaune pour un sweat rouge et jaune. Chacun sa tenue de combat.

Le film apporte une certaine réflexion sur les femmes et leur âge. Constance donne l’étrange impression de se voir en Audrey, comme un miroir qui la ramène des années en arrière quand elle la princesse désirée de tous. Jeune, belle et compétente, la chance sourit à Audrey. La triste réalité c’est qu’à partir d’un certain âge, il devient plus difficile pour les femmes de retrouver un travail dans lequel l’apparence est un atout. Il aborde aussi la misère sociale, celle des employés diplômés et compétents qui, faute de travail, sont obligés d’être mobiles, de retourner vivre chez leurs parents à 40 ans, n’ayant que pour vivre le RSA et un profond sentiment d’échec.

Irréprochable est l’adjectif idéal pour décrire le  personnage de Constance. Complexe et travaillé, il remplit le film de sa présence. Rôle très sportif, Constance enchaîne les courses, les pompes, les abdos, son corps est musclé, une force physique qui pourrait s’allier à un esprit sain, rien n’est moins sûr. Dans son placard, il se cache de nombreux cadavres ainsi que des vieilles affaires de son adolescence. Que s’est-il réellement passé pour qu’elle ait eu une envie frénétique de partir de son patelin ? Pourquoi les personnes qu’elle retrouve après tant d’années d’absence font preuve de rancœur et de méfiance ? Constance est une fonceuse qui ne se remet jamais en question, capable de tous les excès jusqu’à en devenir une maniaque psychotique. [spoiler] C’est là une véritable bonne idée que de transformer cette pauvre victime en apparence, d’un hypothétique harcèlement, en une névrosée capable des extrêmes, devenant elle même une tyran [spoiler]. A côté de ce rôle solaire magnifiquement interprété par Marina Fois, gravite des personnages secondaires intéressants mais moins consistants. Benjamin Biolay est un gros obsédé sexuel libidineux et adultérin, Jeremie Elkaïm est peu expressif, il est bien difficile de savoir son degré de complicité envers Constance. Puis il y a Joséphine Jappy, espoir du cinéma français, qui est une rivale de faible ampleur pour Marina Foïs. On remarque que les hommes ont le mauvais rôle  entre Biolay ersatz de DSK et Elkaïm en amoureux lunaire, ce sont les femmes qui même la danse dans ce premier long encourageant pour le romancier Sebastien Marnier.