Les banlieues tentées par le FN

Banlieues. Cela fait plus de 30 ans que les gouvernements successifs n’ont rien fait de sérieux pour aider les millions d’habitants des banlieues, notamment la jeunesse essentiellement issue de l’immigration, à se sortir du cadre de vie déplorable et lamentable dans lequel ceux-ci se trouvent. Aucune politique digne de ce nom n’a été réellement entreprise. Question légitime que l’on est en droit de se poser : pourquoi cela changerait-il demain ?

Pourquoi les banlieues risquent de voter massivement pour le Front National ? A cette question, il y a évidemment beaucoup d’éléments de réponses. Voici mon analyse personnelle sur le sujet :

Banlieue. Cela fait plus de 30 ans que les gouvernements successifs n’ont rien fait de sérieux pour aider les millions d’habitants des banlieues, notamment la jeunesse essentiellement issue de l’immigration, à se sortir du cadre de vie déplorable et lamentable dans lequel ceux-ci se trouvent. Aucune politique digne de ce nom n’a été réellement entreprise. Question légitime que l’on est en droit de se poser : pourquoi cela changerait-il demain ?

Qu’il s’agisse de madame Ségolène Royal, de messieurs François Bayrou et Nicolas Sarkozy, ces derniers sanctionneraient-ils la banlieue, si cette dernière exprimait un vote extrême, en cas de victoire de l’un d’entre eux ? Certainement pas ! Cela ne ferait que plonger les banlieues dans une déliquescence déjà dramatiquement ressentie. De plus, la cohésion sociale risquerait d’en pâtir. Et puis, des représailles électorales dans une démocratie auraient comme des airs de dictature. Cela reviendrait donc à se tirer une balle dans les pieds.

Bien au contraire, les candidats potentiellement bien placés dans cette course à la présidence de la République seraient bien avisés de tenir compte de ce vote massif probable pour le FN et d’en tirer les conclusions qui s’imposent. Il est impensable que nous continuions ainsi comme si de rien n’était. La politique de l’autruche connaît des limites. Ne rien voir en fermant les yeux, ou continuer à chanter qu’il fait beau alors qu’il pleut à torrent, c’est je crois bien fini. Chacun doit maintenant assumer ses responsabilités. Hier et aujourd’hui vont dorénavant se conjuguer au passé.

Le Front National a été monté en épingle par la classe politique. Ce parti a servi les intérêts de la gauche, celle-ci l’ayant instrumentalisé dans le but de créer des divisions au sein des partis de la droite, dite classique. Au-delà de ces tactiques stratégiques et purement politiciennes, il y a un autre aspect, plus sociologique. La société française connaît des difficultés politiques, sociales et économiques. Ce n’est pas un scoop. Et comment faire en sorte que les Français puissent exprimer leurs malaises profonds et, en somme, se défouler sans que cela n’ait trop de conséquences sur la bonne marche politique du pays, et si possible sans trop perturber le système en place ? Très simple : le Front National va servir d’exutoire. Les Français vont, à travers le FN, exprimer leurs mécontentements, à la manière d’un bouc émissaire. Mais toujours, il leur sera brandi, au dernier moment, la menace du fascisme, du nazisme et, au moment fatidique du choix ultime, les électeurs vont se rétracter, finissant pas voter plus « sagement » par peur de l’inconnu. On l’a bien vu en 2002. Au nom d’un sursaut républicain, Jacques Chirac n’a même pas eu besoin de justifier son bilan de président sortant, puisque même la gauche avait appelé à voter pour lui. Autrement dit, les Français se défoulent au premier tour comme pour se soulager des maux qui les rongent, quitte à envoyer Jean-Marie Le Pen au second tour. Puis, en raison d’un excès de culpabilité, psychologiquement bien entretenu par les tenants du système, les électeurs finissent par revenir se jeter dans les bras de leurs anciens dirigeants ainsi redevenus les sauveurs de la démocratie et de la République. La machine est bien huilée. La manipulation a jusqu’ici parfaitement bien fonctionné.

Mais voilà ! Il y a un mais. Lorsque monsieur Jean-Marie Le Pen dit et prouve que finalement il a été diabolisé alors qu’il dénonçait des vérités qui font aujourd’hui le succès et la gloire de monsieur Nicolas Sarkozy, alors là on se dit : le Front National a fini de jouer. « Françaises, Français, ayez maintenant le courage d’aller jusqu’au bout de vos idées et ne me laissez pas seul face aux perfides du système actuel », semble lancer monsieur Jean-Marie Le Pen aux citoyens. Le Président du FN a d’ailleurs mis beaucoup d’eau dans son vin. Il ne prêche plus la remise en cause systématique des Français d’origine étrangère. Mieux encore, il dit que les immigrés vivant en France ne sont en rien responsables (ce qui est évidemment vrai) de la situation actuelle, mais que ce sont plutôt les carences des dirigeants politiques, de gauche et de droite, qui sont les uniques responsables de l’actuel état catastrophique de la France. Cette nouvelle attitude est, je le pense, capitale pour la suite. En ce sens, le discours de Valmy a été, à mon avis, un tournant décisif. Le FN porte-t-il un masque ? Peut-être a-t-il tout simplement mûri, mieux en phase avec la réalité politique, sociale et multiculturelle du pays.

La convergence entre les acteurs (de différents horizons) de la société française, en tant qu’entité constituée de plusieurs courants désormais affluant vers une même stratégie, est déterminante dans cette nouvelle donne de la politique française. Monsieur Jean-Marie Le Pen sait à présent qu’il est l’homme à battre et à « abattre ». Ses vérités dérangent. Ce qu’on lui reprochait hier, en invoquant un populisme irrationnel et une démagogie dangereuse de sa part, est devenu aujourd’hui sa force principale. Parce que les partis traditionnels ont été dans l’incapacité de répondre aux vrais problèmes des Français et que justement monsieur Le Pen évoquait, toute sirène dehors. Aussi, cet appel qu’il a lancé en direction de la population française, notamment vers celle des banlieues, a semble-t-il été entendu. Pourquoi ? D’abord parce que ce parti s’est restructuré et sait maintenant se faire « respecter ». Aucun parti politique « du sérail » ne s’est précipité pour le désigner, comme autrefois, de parti nazi, fasciste et xénophobe. Sans doute pour ne pas s’attirer la foudre des électeurs. C’est un signe qui ne trompe pas ! Ensuite, que son électorat veuille à présent passer à la vitesse supérieure en assumant pleinement ses idées et en exprimant jusqu’au bout son rejet de la classe politique dite traditionnelle, me parait être rentré dans les mœurs. Faut-il s’en inquiéter ? A cette interrogation, les autres candidats ne se sont, étrangement, que très peu exprimés sur le sujet. Sans doute par peur de se brûler les lèvres et de perdre encore des voix.

Enfin, les jeunes des banlieues, principalement mais ils ne sont pas les seuls, semblent adresser le message suivant aux actuels dirigeants : « vous avez mis au monde un bébé baptisé FN, en jouant aux apprentis sorciers en matière de racisme, d’insécurité et de xénophobie, eh bien, ce bébé, nous allons maintenant vous le renvoyer à la figure, comme preuve de notre accusé de réception ». Et très franchement, cette symbiose entre le FN et des banlieusards d’origine noire ou arabe, qui l’aurait imaginée au départ ? Il ne faut pas jouer avec des valeurs comme la Patrie , la Nation , l’Honneur et la Démocratie. A jouer avec le feu on finit par se brûler tôt ou tard. On apprend cela aux tout-petits. Les manipulations politiques explosives finissent toujours par vous détonner en pleine figure. M. François Bayrou devrait y songer sérieusement, lui qui veut faire travailler ensemble des frères ennemis.

Mesdames et messieurs, élites de la classe politique française, vous nous avez mis dans de bien jolis draps. Grâce à vous et à vos compétences indéniables en alchimie, vous avez réussi à réaliser l’impensable : les Français d’origine immigrée vont voter pour le FN. Il fallait tout de même le faire ! Et cela mériterait bien un prix Nobel, à défaut d’une tarte dans la figure ! Et si l’on ajoute à tout cela que beaucoup ont l’intention de faire sauter un système qu’ils jugent corrompu et détourné de sa noble tâche de servir les citoyens, en votant précisément pour le Front National, je crains bien que les éternels rappels du genre : « soyez raisonnables, ne votez pas pour les extrêmes » ne trouvent plus aucun écho parmi nombre de citoyens français. Nous allons, décidément, vers un été très chaud, mais celui-là est dû au réchauffement de la planète « politique ».

Dans ces conditions, et après analyse de la situation, expliquez-moi en quoi les banlieusards se priveraient-ils de voter pour le FN. Qu’ont-ils à perdre ? Cette question devrait maintenant résonner dans les tympans de tous les ténors politiques sortants ! Et bonjour demain.

Vous êtes, mesdames et messieurs les dirigeants politiques français, les seuls responsables de cette situation ubuesque et risible s’il ne s’agissait pas, en fait, de l’avenir de la France. Alors , ne vous en prenez pas aux électeurs mais à vous-mêmes !

Touhami Moualek