Le Liban empêtré dans la violence !

Le Liban dans son ensemble et Tripoli en particulier devenus cette caisse de résonnance de la crise syrienne témoignent quotidiennement au monde  de leur incommensurable maîtrise de l’art de la violence. Indétrônable en cette matière de prédilection, les Libanais ont démultiplié leurs chances de gagner un droit de cité supplémentaire dans le Guinness : celui de guerroyer après celui glorieux, déjà acquis, pour la préparation du plus grand plat de hommos, de taboulé ou que sais-je ! 

Qousseir, Qaramoun, Maaloula, etc, convulsent aussitôt sunnites et alouites de Bab el Tebbaneh et Jabal Mohsen prennent le relais, s‘étripant jusqu’à la mort, parfois. Takfiristes contre non takfiristes, selon le jargon local ! Toutes les médiations s’étant avérées infructueuses, et les réponses en demi-mesures étant vouées à un échec certain, il a été décidé que la ville de Tripoli sera sous contrôle martial pendant une période de six mois. C’est dire. 

Très loin d’être l’apanage des Tripolitains, la guéguerre sévit dans tout le pays et se décline sous des formes diverses et variées et les incidents suivants l‘illustrent bien. Suite à de récentes élections estudiantines marquées par la victoire de l’Alliance du 14 Mars, le campus de l’université St Joseph a été le théâtre de tensions  mettant face à face huit et quatorze Marsiens avec tout un cortège de déboires. Même pour ramener l’ordre, des responsables politiques assez décomplexés usent d’un langage qui ne peut que laisser un triste impact sur certains : le député Nadim Gemayel a menacé d’envoyer « ses propres casseurs » pour faire taire les éléments extérieurs à l’université et affiliés au Hezbollah. Une réaction parmi tout un ramassis ! 

Malgré l’accoutumance à la violence, voilà qu’aujourd’hui effarouchés, les Libanais poussent des cris d’orfraie devant un incident qui s‘inscrit dans ce même registre devenu banal : un certain businessman quadragénaire en compagnie de sa fiancée suisse cherchait sans doute à tuer quelques heures nocturnes dans le quartier d’Achrafieh avant de déposer sa bien aimée à l’aéroport. 

Quand à bord de son Infiniti, un jeune homme se met à draguer grossièrement sa blonde, le promeneur proteste. Puis les échanges désobligeants dégénèrent vite en bagarre avec un rapport de force jouant en faveur du jeune rejoint par toute une bande de copains. Toute cette jeunesse dorée à la sauce libanaise venait de sortir d’une soirée huppée et bien arrosée. Le couple croule sous les coups ponctués d’insultes dont la plus soft « nous allons te briser les os le chiite, ici, ce n’est pas la Suisse  » ! 

Les secouristes alertés par les cris n’ont pas été épargnés des coups ; chacun en a malheureusement reçu pour son grade. Il paraît que prévenu, le géniteur de deux agresseurs, appartenant à la High society libanaise, est venu sur les lieux de l’agression sceller un pacte de collaboration avec la victime : après avoir pris un verre dans un bar du coin avec le couple, il a parlé carrément de propositions de business, histoire de passer l’éponge à la libanaise. 

Une fois le vol de la fiancée réglé, l’agressé a déposé plainte auprès du commissariat avec preuves à l’appui. Mais c’était sans compter sur la ténacité du père des voyous de « bonne famille », épris de business qui lui téléphone : « wallaw nous avons pris un verre ensemble, il faut retirer la plainte » ! Wallaw n’a pas et ne peut avoir d’équivalent dans la langue française. Wallaw, c’est un état d’esprit. On vous fait du mal et le wallaaaaaaaaaaaw fait office à lui seul d’éponge ! 

Même si on l’a longtemps affublé de l’étiquette de Suisse du Moyen-Orient, le Liban ne l‘a finalement jamais été. Sinon on n’en serait pas là…