Le surréalisme, une touche de rêve dans un monde de brutes

L’imagination n’a pas de frontière, elle est une terre sans limite, un domaine non flanqué de murs, une aire sans barrière. Exercer son imaginaire, c’est le champ des créatifs, le cultiver c’est penser le monde de demain et d’une certaine façon, fuir la présente réalité. Quand le présent devient si pesant, si anxiogène, il est bon de s’évader dans le rêve et la féerie. Le mécanisme est souvent simple, plus celui-ci sera difficile à vivre et plus l’échappatoire chimérique en sera renforcé. On peut penser cela comme une forme de lâcheté, mais d’autres diront que c’est une façon de mieux appréhender les faits. Pour être sensible à cette forme d’art, il est nécessaire de lâcher du lest, à l’instar d’une montgolfière cherchant à atteindre une altitude où règne la sérénité et la quiétude des nuages. 

 
 
Nous ne sommes certainement pas dans une période aussi troublée que la Première Guerre Mondiale, lorsque la Mort tutoyait la Vie, mais force est d’avouer que nous allons mal. Le contexte n’est pas propice à l’optimisme, récession économique, plan sociaux, chômage croissant, nous avons besoin de nous extirper de ces tristes nouvelles, faisons alors un voyage dans les steppes non conventionnelles du surréalisme. 
 
 
Ce courant artistique est né dans la première partie du XXème siècle, plus concrètement, on fixe sa création avec la publication du Manifeste du surréalisme d’André Breton, publié en 1924 et la mise en place du Bureau de Recherche. Il définit ce mouvement en ces termes : "un automatisme psychique[…] en dehors de toute préoccupation esthétique morale […] qui tend à ruiner les autres mécanismes psychiques." Ses bases sont donc fondées sur l’automatisme, l’interprétation des rêves et l’importance de l’inconscient. Une manoeuvre créatrice contre la raison destructrice avec un grand "R". Philosophiquement, il se trouve entre Rimbaud avec son "changer la vie", Marx et son "transformer le monde", puis Freud avec la mise en avant du lien intrinsèque entre le réel et le songe. Pour résumer, être surréaliste requiert une technicité bien spécifique, il faut utiliser de l’écriture rapide, de l’analyse réfléchie des rêves, des cadavres exquis, de l’hypnose et bien sûr, de la consommation de produits illicites procurant des délires hallucinatoires ( attention les enfants, ceci n’est pas à reproduire). 
 
 
Bien avant, il y eut des prémices, des bourgeons avant que cette fleur n’éclose et resplendit. On peut évoquer le super naturalisme, le sur naturalisme ou bien encore, le symbolisme. Le plus fameux est sans doute le dadaïsme, crée en 1916 par le groupe littéraire réuni autour de la personne de Trsitan Tzara, cependant sa durée de vie fut courte et il disparut en même temps que le tsar, lorsqu’ éclata la Révolution Russe de 1917. Il a été une réaction aux atrocités de la Grande Guerre, quand la confiance aveugle dans la Science, supposée apporter le bien-être, s’est mise au service de l’extinction de la race humaine. Devant les morts et les blessés, les dégâts sur les infrastructures, sur les corps des soldats et sur le moral des troupes, il était nécessaire de repenser le monde différemment. A quoi bon mettre la science et la raison sur un piédestal alors qu’elles ne sèment que le chaos. Elles permettent des massacres, engendrent le malheur, rendent l’essor industriel possible. Lui qui asservit des millions d’ouvriers à des tâches déshumanisantes. C’est en ce sens que les thèses surréalistes épousent les idéaux initiaux du communisme naissant. De ce fait, beaucoup d’artistes militent pour le Parti Communiste, mais ils déchantent rapidement quand ils s’aperçoivent de la dérive autoritaire du pouvoir. 
 
 
Ce côté rétrograde, entravant le progrès sera fortement décrié par les détracteurs du surréalisme. Plus globalement, les surréalistes sont apolitiques, n’appartiennent à aucun parti, mais cela ne les empêchent pas de militer quand une affaire publique leur tient à coeur. L’anti conformisme bourgeois, la lutte contre le racisme, la lutte contre les colonies, celle contre le totalitarisme religieux et politique, le tout sur un ton volontairement provocateur, telles étaient les thèses qu’ils défendaient. Alors certains diront que l »on peut faire une forme de jonction entre ce mouvement artistique et l’anarchisme. Mais contrairement à la violence des anars au drapeau noir, les hommes à l’origine du surréalisme ont préféré favoriser la féerie et le merveilleux afin qu’ils puissent déteindre sur la réalité pour l’améliorer. Prônant une fracture dans la douceur plutôt que dans la fureur et les cris.  
 
 
Le surréalisme est multidisciplinaire, touchant aussi bien la littérature, que la peinture et le cinéma. Dans le Bureau de Recherche d’André Breton, on retrouve par exemple des écrivains, Robert Desmos, Paul Eluard, Philippe Soupault, des poètes, Louis Aragon, Jacques Prévert, des peintres, Salvador Dali, René Magritte. Ces arts se côtoient, se mêlent et se combinent comme le montre ce splendide exemple du ballet composé par Jean Cocteau, pour le chorégraphe Daghilev, mis en musique par Eric Satie et décoré par Pablo Picasso, en 1917. Cette "Parade" fut tellement exceptionnelle et extraordinaire, qu’elle fit naître sous la plume d’Apollinaire, le mot de "surréaliste". 
 
 
Le surréalisme ne se cantonne pas seulement à la France mais touche le monde entier grâce au biais de la francophonie. Il a stimulé la création des artistes étrangers comme des poètes espagnols, tchèques, yougoslaves, des dessinateurs socialistes polonais résistant contre le communisme stalinien ou bien encore des écrivains et des auteurs de mangas japonais. 
 
 
Le surréalisme n’est pas une chose légère mais une vraie forme de pensée voulant rendre la société meilleure. Le monde doit s’embellir, nous pas seulement par l’effort de la Science, de la Raison pure et dure, mais également avec un brin de fantaisie. Un vent vrai pour éviter une asphyxie dans un climat incertain. Le terme "surréaliste" est formé du préfixe "sur" pouvant signifier que la chose en question est hors d’un référent désigné, mais également qu’elle empiète dessus. Dans ce cas, l’imaginaire peut parfois prendre le dessus sur le réel. 
 

3 réflexions sur « Le surréalisme, une touche de rêve dans un monde de brutes »

  1. [quote][b]Tristan Tzara – Pour faire un poème dadaïste[/b]

    [b]Pour faire un poème dadaïstes[/b]
    Prenez un journal
    Prenez des oiseaux
    Choisissez dans ce journal un article ayant la longueur que vous comptez donner à votre poème.
    Découpez l’article.
    Découpez ensuite avec soin chacun des mots qui forment cet article et mettez-les dans un sac.
    Agitez doucement.
    Sortez ensuite chaque coupure l’une après l’autre dans l’ordre où elles ont quitté le sac.
    Copiez consciencieusement.
    Le poème vous ressemblera.
    Et vous voici un écrivain infiniment original et d’une sensibilité charmante, encore qu’incomprise du vulgaire[/quote]

    J’a[b]i fait des poèmes selon cette méthode(Tristan Tsara)cela donnait quelque chose de très spécial![/b]

  2. [b]effectivement on peut considérer que le courant suivant c’est le transhumanisme …
    oui, non (rayez la mention inutile)[/b]

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