Le strabisme, l’art du décalage physique et moral

Le strabisme, pour ceux qui ne connaissent pas, c’est le fait de loucher. Il existe différents types de strabisme : divergeant, convergeant et vertical. Ils apparaissent la plupart du temps dans l’enfance et sont aujourd’hui et depuis de nombreuses années, très bien opérés. Parfois, ceux-ci persistent et peuvent encore être présents à l’adolescence ou à l’age adulte. Mais, plus qu’une banale coquetterie, ce ou ces décalages oculaires peuvent causer bien des troubles aux personnes strabiques.

 

 

Déjà, il y a l’absence de vision binoculaire (lorsque les deux yeux sont actifs au même moment) et le risque de vision double. Les yeux fatiguent plus vite et peuvent être à l’origine de migraines, surtout si le strabisme est accompagné d’un problème de la vision (myopie, hypermétropie, astigmatisme etc…) D’autre part, la concentration notamment sur ordinateur fatigue énormément les yeux et entraine une accentuation du strabisme.

Hormis les aspects physiques, les aspects psychologiques sont davantage à prendre en compte dans ce type de pathologie. En effet, il est à l’origine d’un gros manque de confiance en soi chez la personne strabique. La peur du regard des autres est handicapante, la dénigration de soi est omniprésente. Cette même personne peut se refuser de sortir dehors, d’aller à un rendez-vous sous prétexte que son oeil louche trop à son goût. Chez certains individus, pour peu qu’ils aient souffert de remarques désobligeantes et continuent d’en pâtir, vivre peut devenir une épreuve. Ils se considèrent comme un énorme complexe sur pattes, et sont persuadés que leur strabisme détermine d’avance tout ce qu’ils sont. Considérant que ce décalage oculaire est une « tare », ils en viennent à se trouver eux-mêmes ridicules dans leur existence.

De nombreux témoignages ont été recueillis à ce sujet à travers différents forums spécialisés. Ainsi, Jennifer 25 ans, nous livre ici son témoignage : « Depuis que je suis petite je souffre du regard des autres. J’ai un strabisme convergeant pour lequel je me suis faite opérer, mais sans trop de succès. Tous les jours je recevais des quolibets et ce jusqu’au lycée. Je ne regardais personne dans les yeux, évitais soigneusement de faire un exposé au tableau… j’avais peu d’amis et sortait peu de peur que les gens ne remarquent que ça. J’ai vécu recluse toute ma jeunesse, bouffée par mon complexe, et je ne fais guère mieux aujourd’hui. Au travail, je rase les murs et j’ai de rares contacts avec mes collègues. »La plupart des personnes qui se sont confiées sur ce site, parlent très souvent d’un gros mal-être. Le témoignage de Julien, 33 ans, nous a particulièrement ému :« J’ai toujours vécu avec cet horrible défaut. Puis un jour j’en ai eu marre de ne pas arriver à vivre la vie que je voulais et j’ai essayé de mettre fin à mes jours. Mon aspect physique m’était devenu insupportable, je voulais arrêter de souffrir ».

Heureusement, dans beaucoup de cas l’opération du strabisme, même à l’age adulte est possible. Elle se pratique généralement sous anesthésie générale et nécessite un arrêt maladie d’environ deux semaines selon les cas. Elle se fait aujourd’hui en ambulatoire, bien que cela soit contesté par les patients opérés des deux yeux. Selon les types de strabismes, on peut opérer un seul oeil voire les deux. Lorsque le chirurgien intervient sur les deux yeux, la patient récemment opéré se voit dans la difficulté de se déplacer et d’effectuer une quelconque tache stimulant la vision. La première semaine est assez handicapante en vérité, mais c’est aussi le fait de l’anesthésie générale. Les yeux sont très rouges, et des points sont visibles mais un traitement permet de les cicatriser. Piscine et mer sont vivement déconseillés dans les deux semaines qui suivent l’intervention, car il y a un risque d’infection. La vision est plutôt perturbée et des risques de vision double peuvent survenir (diplopie). On évite bien sur les sources de luminosité intense comme le Soleil et l’on se munit toujours de lunettes de protection solaire pour sortir. Dans la plupart des cas le strabisme se résorbe, mais les résultats ne sont effectifs qu’environ six mois après la chirurgie des yeux. Célia, 23 ans, témoigne : « Depuis que je me suis faite opéré et que mes yeux sont désormais alignés, j’ai changé de vie. Je fais tout ce que je n’osais pas faire avant. Je sors beaucoup plus, et j’ai la vie qu’une jeune femme lambda! ».

Pour une opération du strabisme et des yeux en général, mieux vaut privilégier un hôpital ou une clinique spécialisés dans la chirurgie des yeux. A noter également qu’une intervention doit toujours être extrêmement réfléchie même si cette pathologie s’opère bien aujourd’hui (une majorité d’enfants sont opérés!). Après l’intervention chirurgicale, les ex-strabiques et leurs proches se rendent compte que finalement le strabisme, ce n’est pas si louche que ça!

6 réflexions sur « Le strabisme, l’art du décalage physique et moral »

  1. Bon article.
    J’ajouterai que ce que appelle communément la gymnastique des yeux dès le plus jeune âge peut aussi avoir de très bons résultats ainsi que la correction optique par des lunettes adaptées.
    Ce qui évite à l’enfant de subir tous les quolibets tout au long de sa jeunesse.

  2. Super article.
    Je me suis fait opérer 2 fois d’un strabisme (la dernière opération il y a 2 semaines). Mon oeil est presque redevenu normal 🙂 encore un peu rouge mais ca va, encore quelques vertiges quand je ferme l’oeil dominant…

    c’est une opération que je conseille même si les résultats sont difficiles à voir au début…

    par contre je suis aussi myope, et je préfère garder mes lunettes… je ne suis pas encore prêt à refaire souffrir mon oeil 🙂

    on est maintenant tous les deux des strabiques au yeux droits 🙂

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