La république populaire de Chine l’après Mao Zedong, suite 4

subtile évolution

 

Dès la mort de Mao Zedong, Hua Guefong affirme son pouvoir. «La Bande des Quatre» qui est un groupe de dirigeants instigateurs de la révolution culturelle c’est à dire les leaders radicaux, dont la veuve de Mao, Jiang Qing, et trois de ses proches, Zhang Chunqiao, membre du comité permanent du Bureau politique, Yao Wenyuan, membre du Comité central, et Wang Hongwen, vice-président du Parti, ainsi que deux autres personnalités du Parti, Kang Sheng et Xie Fuzhi, mortes avant 1976, furent accusés d’avoir participé à l’activité de cette «bande».

En janvier 1976, à la mort de Zhou Enlai, le premier ministre de la République populaire devient Hua Guofeng chef de la propagande du parti au milieu des années 1940, puis ministre de la sécurité publique en vice premier ministre 1975, il est choisit par Mao Zedong. Il est le principal artisan de l’arrestation de la bande des quatre en octobre 1976. La femme de Mao, Jiang Qing, chef de file des radicaux, avait tout fait pour s’emparer du pouvoir qu’elle considérait comme devant lui revenir. Leur tentative ne fit pas long feu face au front commun des Maoïstes modérés, auxquels appartenaient le Premier ministre Hua Guofeng, et des pragmatiques emmenés par Deng Xiaoping qui étaient prêts à tout pour éviter un retour aux excès des années précédentes qui avaient mené la Chine au bord du gouffre.

La «Bande des Quatre» est arrêtée dès le 6 octobre. Ces membres ont été exclus à vie du parti en juillet 1977. Ils ont été jugés en novembre 1980, avec six autres personnes, cinq hauts officiers proches de Lin Biao qui l’avaient aidé dans sa montée au pouvoir en 1971, et Chen Boda, secrétaire de Mao et promoteur de la Révolution culturelle. Le procès fut diffusé à la télévision. L’acte d’accusation précisait qu’ils étaient accusés d’être directement responsables de la persécution de «729 511 personnes» et de la mort de 34 800 d’entre elles pendant la Révolution culturelle. Zhang Chunqiao garda le silence pendant tout le procès, alors que Jiang Qing montra toute sa colère. Tous deux furent condamnés à mort avec un sursis de deux ans leur permettant de se repentir. Les autres furent condamnés à des peines de prison. Le procès fut considéré par les observateurs extérieurs comme une mise en scène.

Deng Xiaoping revient au pouvoir sans y être tout à fait et le nouveau Premier Ministre Hua le critique, mais devant les pressions des militaires de l’Armée populaire de libération, et à l’issue de tractations confuses, Deng Xiaoping est réhabilité au Comité central le 21 janvier 1977. Il reprend les fonctions de vice-président du Comité central, de membre de la commission du Bureau Politique, de premier vice-président de la commission des affaires militaires du Parti et de chef de l’état-major de l’Armée populaire de libération. Hua s’efface ainsi progressivement au profit de Deng. En décembre 1978, Deng Xiaoping l’emporte sur Hua lors du plénum du Comité central. Il nomme d’ailleurs le secrétaire général du parti au Sichuan Zhao Ziyang, puis au bureau politique en 1979, puis au poste de premier ministre.

En conséquence au mois de décembre, au cours du troisième plénum du 11ème comité central du parti, Deng Xiaoping en 1978 préconise de suivre les recommandations de Zhou Enlai et annonçe le lancement officiel des «Quatre Modernisations», marquant ainsi formellement le début de l’ère des réformes.

Les «Quatre Modernisations» couvraient les domaines suivants :
– agriculture ;
– industrie ;
– science et technologie ;
– défense nationale.

Elles commencèrent par une dé-collectivisation des terres, suivies par des réformes industrielles dont le but était de décentraliser les contrôles du gouvernement dans le secteur industriel. Deng développa l’idée de «Zone Economique Spéciale» où l’investissement étranger pouvait s’effectuer sans restriction du gouvernement, sur des bases économiques capitalistes. Il considéra l’industrie légère comme la base de développement de l’industrie lourde. Dans les campagnes, le système «de responsabilité» amène les paysans à signer avec l’État des contrats qui leur assurent, pour plusieurs années, l’usufruit des terres collectives. Désormais la notion de rentabilité l’emporte en ce qui concerne la production, les achats d’engrais et de matériel. En décembre 1985, les communes populaires disparaissent, de même que le monopole d’État sur les céréales. En même temps, la production augmente, régulièrement suivie par les revenus paysans, à l’efficacité du système «de responsabilité» viennent s’ajouter les effets de la «Révolution verte», qui repose sur l’usage accru des engrais, des pesticides et de la mécanisation, la récolte de 1984 dépasse 400 millions de tonnes. Mais la fin de la collectivisation comporte aussi des aspects négatifs, elle rend inutiles près de 200 millions de ruraux. Le rapide développement des secteurs économiques de consommation, une inflation réduite, des gains d’exploitation et des exportations, la création d’une classe moyenne urbaine regroupant 15% de la population, 200 millions de personnes, un accroissement des niveaux de vie, perçu au travers d’une augmentation importante du revenu par habitant, de l’espérance de vie et du niveau d’éducation et une plus large frange de droits et libertés pour le Chinois moyen témoignent du succès des réformes. 150 millions de personnes échapent à la pauvreté, Par contre le social et l’environnement furent sacrifiés, marquant la difficulté du communiste à se convertir au capitalisme.

Les «Quatre Modernisations» étaient destinées à faire de la Chine une grande puissance économique à l’aube du XXIe siècle. Ces réformes insistaient sur l’indépendance économique. La République populaire de Chine décida d’accélérer le processus de modernisation en augmentant le volume de ses échanges commerciaux et en ouvrant son marché, en particulier pour l’achat de machines en provenance du Japon et de l’Occident. En 1979 il rencontre le président Jimmy Carter lors d’une visite officielle aux États-Unis en janvier, ce qui marque sa volonté d’ouverture. Il aurait autorisé les États-Unis à installer une base servant au renseignement d’origine électromagnétique, SIGINT, «signals intelligence» en Chine, afin d’écouter l’URSS

L’affichage sur le mur de la démocratie à Pékin, en décembre 1978, du manifeste de la «cinquième modernisation», la démocratie, par Wei Jingsheng a entraîné l’arrestation de l’auteur en mars 1979. Deng Xiaoping a ainsi marqué les limites de la réforme.

Le mur de la démocratie était un mur de brique le long de la rue de Xidan dans le centre de Pékin, à l’ouest de la place Tian’anmen, où étaient collés entre novembre 1978 et décembre 1979 les affiches manuscrites ou dazibao des discussions politiques ouvertes après la fin de la période Maoïste et la défaite de la Bande des Quatre. Le mouvement autour de ce lieu où jusque là on affichait des petites annonces fut d’abord spontané. Il attira une foule nombreuse qui y organisait des meetings improvisés durant cette période. On pouvait lire notamment sur ce mur :
* «Tu es venu enfin, à la fois petit et grand. Tu es la volonté indestructible de huit cents millions de gens». (éloge de Deng Xiaoping, dirigeant en faveur de la libéralisation du régime)
* «La cinquième modernisation, la démocratie» (célèbre dazibo de Wei Jingsheng en référence aux Quatre Modernisations de Deng Xiaoping).

Le mouvement sera réprimé et le 6 décembre 1979, le mur de la démocratie sera exilé dans le quartier de Chaoyang, loin à l’est, au parc Ritan, parc public fermé et payant qui permettait un contrôle facile de la fréquentation.

En qualité de président de la Conférence consultative politique du peuple chinois, 1978-1983, puis de la Commission militaire centrale, 1981-1989, pour celle du Parti, 1983-1990, pour la commission de l’État, Deng est, sans avoir officiellement les titres de chef du Parti communiste, de chef du gouvernement, ni de chef de l’état, le véritable numéro un du régime en y occupant la troisième place.

Le 03 avril 1979 la Chine populaire dénonce à l’URSS le traité «d’amitié, d’alliance et d’entraide» qui devait survenir à expiration dans un an. En mai 1980 Lui Shaoqi qui avait été laissé abandonné nu et sans soins puis mort dans une prison est réhabilité par Deng Xiaoping qui avait été lui-même victime de la révolution culturelle.

En 1989, la politique de Deng Xiaoping est critiquée par les étudiants, les professeurs de l’enseignement supérieurs et d’intellectuels qui réclament la «cinquième modernisation», celle de la démocratie et du multipartisme. Ceux-ci sont influencés par la Glasnost, mise en œuvre en URSS par Mikhail Gorbatchev. Les étudiants dénoncent l’insécurité qui règne sur les campus et le manque de débouchés dans les villes du littoral. Les enseignants regrettent de ne pas être mieux payés. Les intellectuels font circuler des pétitions afin de réclamer la libération des prisonniers politiques. Vivement réprimées à l’origine, ces idées de réforme politique reçoivent, vers le milieu des années 80, un accueil plus favorable de la part des réformistes proches de Deng Xiaoping, notamment Hu Yaobang et Zhao Ziyang, secrétaire général et premier Ministre chinois jusqu’en 1987. Les manifestations estudiantines de 1989 font suite à plusieurs mouvements semblables, en 1983, 1985, puis au cours de l’hiver 1986-1987.

Au-delà des demandes de réforme politique, les principales revendications portent alors sur la liberté d’association, création de syndicats étudiants indépendants, et la transparence notamment sur les revenus des cadres et de leur famille. A l’intérieur du Parti Communiste Chinois, deux lignes s’affrontent à la fin des années 1980. Derrière Deng Xiaoping, certains demandent une accélération des réformes, tant économiques que politiques. A l’opposé, et face à la montée de l’inflation provoquée par la libéralisation des prix, les adversaires traditionnels de Deng Xiaoping, notamment l’économiste Chen Yun, prônent un arrêt des réformes, voire un retour au contrôle de l’Etat. Jusqu’en 1986, Deng Xiaoping s’entoure principalement de réformistes, notamment Hu Yaobang et Zhao Ziyang. Cependant, les manifestations étudiantes de 1986-1987 renforcent les partisans d’un arrêt des réformes et poussent Deng Xiaoping à limoger Hu Yaobang, alors Secrétaire général du Parti, et à prendre comme premier ministre Li Peng, un protégé de Chen Yun.

L’ancien premier ministre, Zhao Ziyang, un proche de Hu, prend la tête du Parti. La direction Chinoise se trouve alors divisée entre deux factions, réformistes (avec Zhao) et conservateurs (avec Li). Les dissensions entre ces deux groupes jouent un rôle déterminant dans le mouvement de 1989. Ces divergences au sommet se retrouvent également à l’intérieur de la société Chinoise. La seconde moitié des années 1980 voit une accélération de l’inflation et une augmentation du chômage, qui opposent les ouvriers, qui souhaitent un retour à l’ancien système, aux intellectuels qui désirent une accélération des réformes.

L’ancien secrétaire général du Parti Communiste Chinois, Hu Yaobang, limogé en 1987, meurt le 15 avril 1989, des suites d’une crise cardiaque d’après les sources officielles. Il est admiré pour son courage à la fin de la révolution culturelle et son rôle dans les réformes. Des manifestations spontanées ont lieu dans tout le pays, elles contraignent le gouvernement à organiser des funérailles nationales le 22 avril. Les 16 et 17 avril, des rassemblements spontanés ont lieu place Tian’anmen et demandent la réhabilitation politique de Hu Yaobang. Le 18, quelques milliers d’étudiants se rassemblent sur la place et organisent un sit-in, devant le Grand Palais du Peuple, l’assemblée nationale. C’est la première grande manifestation. Un seul journal national, le Quotidien des Sciences et Technologies en rend compte le lendemain, le reste de la presse est muselé par le département de la Propagande. Le 18 avril, dans la soirée, quelques milliers d’étudiants tentent de pénétrer au Zhongnanhai, lieu de résidence du gouvernement. Ils sont repoussés par la police. Les campus se couvrent d’affiches réclamant la poursuite des réformes et critiquant Deng Xiaoping. Dans la nuit du 21 avril, veille des funérailles officielles de Hu Yaobang, quelque 100 000 étudiants se dirigent vers la place Tian’anmen, où ils s’installent avant qu’elle soit fermée par la police. Un important rassemblement, interdit par les autorités, a lieu sur la place Tian’anmen, devant le monument aux héros du peuple. Une délégation demande à assister aux obsèques. A Pékin, ces rassemblements sont pacifiques, mais des slogans demandant une réforme politique, continuant ceux des manifestations de 1986-1987, qui avaient provoqué la chute de Hu Yaobang, apparaissent. Le 22 avril, les étudiants demandent à voir Li Peng, considéré comme le rival de Hu Yaobang. Le même jour, des manifestations dégénèrent en province (à Xi’an et Changsha). A Shanghai, le 19 avril, le World Economic Herald, magazine proche des réformistes, prépare pour son numéro à paraître le 24 avril un dossier consacré à Hu Yaobang, dans lequel doit paraître un article de Yan Jiaqi qui rend compte de la manifestation du 18 avril à Pékin, et demande une réévaluation du limogeage de Hu.

Le 21 avril, un responsable du parti de Shanghai demande à son rédacteur en chef Qin Benli de modifier, ou supprimer cet article. Comme celui-ci refuse, il se tourne vers le secrétaire du Parti, Jiang Zemin, qui intervient pour faire interdire l’article. Entre temps, quelques exemplaires ont été diffusés, les autres paraissent avec une page blanche. En représailles, l’éditeur en chef est limogé, et le magazine mis sous tutelle du Parti de Shanghai.

Le 26 avril, un éditorial du Quotidien du Peuple qualifie les manifestations étudiantes de «troubles à l’ordre public», fait d’un «très petit nombre». Il interdit toute nouvelle manifestation. Dès le soir du 26, l’agitation est forte dans les universités de la capitale, notamment à l’Université de Pékin et l’Université du Peuple. Les étudiants rejettent le contrôle des associations universitaires qui sont entre les mains du Parti Communiste Chinois. Ils fondent leur propre association autonome et se choisissent des représentants. Les jours suivants de grandes manifestations ont lieu à Pékin, le 27 avril, elles rassemblent quelque 50 000 personnes. Le mouvement s’étend également en province et il se développe lorsque les ouvriers rejoignent le mouvement afin de remettre en cause la corruption du régime et de protester contre l’inflation, le chômage et le luxe dans lequel vivent les cadres du PCC.

Le 4 mai, la manifestation commémorative du «Mouvement du Quatre Mai» se mélange à celle des étudiants.

[La République de Chine est entrée en guerre contre l’Allemagne auprès des Alliés en 1917. À la Conférence de paix de Paris (1919) qui aboutit au traité de Versailles, les Alliés attribuent au Japon la partie des territoires du Shandong auparavant sous contrôle de l’Allemagne. Cet accord convient aux autorités chinoises qui obtiennent un prêt du Japon, mais enflamme la jeunesse universitaire qui, le 4 mai 1919, peu après la naissance de la République Chinoise, manifeste dans les rues de Pékin aux cris de « il faut sauver le pays ». Trois mille étudiants manifestent ainsi sur la place Tian’anmen].

Elle se déroule dans le calme et la bonne humeur. D’autres grandes manifestations naissent dans les grandes villes du pays comme Urumqi, Shanghai et Chongqing, plus tard, le mouvement touche Hong Kong, Taiwan et les communautés de la diaspora Chinoise en Amérique du Nord et en Europe. Peu après, le dirigeant soviétique, Mikhail Gorbatchev, doit effectuer à Pékin une visite historique. Elle entraîne la présence de nombreux journalistes étrangers en Chine. Le 12 mai, les étudiants entament une grève de la faim illimitée sur la place Tian’anmen. Elle finira par concerner plus de 1000 personnes. Ils sont rejoints par des délégations d’étudiants de province, qui campent également sur la place. A partir de l’annonce de la grève de la faim, le mouvement étudiant reçoit l’appui d’une large partie de la population.

A Pékin, des manifestations de soutien, qui regroupent des étudiants, des ouvriers, des cadres, et même parfois des policiers, ont lieu presque tous les jours, réunissant, à partir du 15 mai plusieurs centaines de milliers de personnes.

Au cours de la journée du 19 mai, Zhao Ziyang, favorable à un règlement négocié du conflit, est mis en minorité par les partisans d’une ligne dure, menés par Li Peng. Le soir, via les haut parleurs de la place Tian’anmen, Yuan Mu, le porte parole du gouvernement, annonce aux étudiants la proclamation de la loi martiale.

Zhao Ziyang est immédiatement limogé, et placé en résidence surveillée. Il y restera jusqu’à sa mort. Ses proches collaborateurs tombent en disgrâce. Autour de Li Peng se retrouvent le président de la république, Yang Shangkun, et son frère Yang Baibing, très proches de l’Armée Populaire de Libération. Sitôt après l’annonce, des soldats de la 38ème armée, chargée de la défense de Pékin, prennent position autour de la capitale. A Pékin, les étudiants demeurent sur la place, et dressent des barrages aux portes de la ville. Le 20 mai, l’armée recule devant les manifestants pacifistes. Chai Ling prend la direction de la coordination étudiante autonome. Le 30 mai, une statue de la déesse de la démocratie qui rappelle la Statue de la Liberté de New York, est érigée sur la place par les étudiants de l’académie des Beaux Arts.

Dans la nuit du 3 au 4 juin 1989, des soldats de la 27e et de la 28e armée entrent dans Pékin. Ils tirent à la mitraillette contre les personnes qui s’interposent sans arme. Des heurts violents avec les manifestants ont lieu sur les axes qui mènent à la Place Tian’anmen, en particulier à Muxidi, où une colonne de véhicules est incendiée. Les combats se poursuivent jusqu’à ce que l’armée atteigne la place, écrasant avec ses chars les manifestants restés sous les tentes, la place est évacuée à l’aube. Dans les jours qui suivent, l’armée occupe Pékin, des affrontements sporadiques ont encore lieu la nuit. Le mouvement étudiant est également réprimé en province et une purge sévère est menée dans tout le pays. S’il est clair que l’intervention fit un assez grand nombre de victimes, leur nombre varie nettement suivant les sources :

le gouvernement Chinois donne 300 morts dont 23 étudiants, Zhang Wanshu, ancien dirigeant de l’agence Xinhua, dénombre 727 morts dont 14 soldats, plus de 3700 tués, excluant la disparition ou les morts secrètes et les refus de traitement médical, selon un transfuge de l’APL citant un document circulant parmi les officiels chinois.

Le printemps de la place Tien’anmen est écrasé.

 

Juin 1989 une révolte écrasée place Tien’anmen

 

L’intervention écarte définitivement du pouvoir Zhao Ziyang, alors secrétaire général du parti communiste chinois. Il demeurera en résidence surveillée jusqu’à sa mort. Bao Tong, son secrétaire politique, est arrêté. Condamné en 1992, il est en résidence surveillée depuis 1996. Deng Xiaoping remplace Zhao par Jiang Zemin, le secrétaire général du parti de Shanghai, jusque là peu connu. Dans la population, la reprise en main est rapide. Deng Xiaoping, silencieux pendant toute la durée des évènements, prononce le 9 juin un discours, où il résume la position officielle sur les évènements. Pendant les douze mois qui suivent des commissions d’enquête sont créées, qui interrogent tous ceux qui ont pris part aux évènements.

Ceci met fin définitivement aux mouvements étudiants des années 1980. Dès la fin de l’été, une série de campagnes d’opinion sont lancées, autour de thèmes patriotiques, notamment le personnage de Lei Feng, et des Quatre Principes Cardinaux, Voie Socialiste, Dictature du Prolétariat, Marxisme Léninisme, Pensée Mao Tsé Toung, Prééminence du Parti Communiste. Les médias qui s’étaient montrés favorables aux étudiants ou à Zhao Ziyang sont remis au pas. L’idée de réforme politique ou de démocratisation, envisagée jusque là par certains éléments du Parti, est abandonnée.

L’explication officielle, fournie par Deng Xiaoping quelques jours après le 4 juin et inlassablement reprise depuis, est qu’un petit nombre d’émeutiers, pour l’essentiel des repris de justice et des chômeurs mécontents, avaient attaqué les soldats qui venaient mettre de l’ordre sur la place Tian’anmen, et l’armée avait dû se défendre. En particulier, la thèse officielle insiste sur le fait qu’il n’y a pas eu de mort sur la place, et affirme que les victimes n’étaient pas des étudiants. Le mouvement étudiant d’avril et mai est, pour sa part, qualifié de troubles politiques.

Vingt ans après, les évènements de 1989 sont toujours un sujet tabou en Chine. Ils ne sont pas évoqués dans les livres d’histoire, ni enseignés. Chaque année, le 4 juin, la place Tian’anmen est très surveillée, pour éviter toute commémoration. Les sites internet étrangers sur le sujet sont censurés ou bloqués (la présence d’articles sur 1989 a été citée comme une des raisons du blocage de Wikipédia en Chine), et des moteurs de recherche tels que Google et Yahoo ont dû, pour s’installer en Chine, adapter leurs programmes pour qu’ils interdisent toute recherche efficace sur ces évènements.

Enfin, la simple mention de ces sujets sur des sites webs ou des blogs Chinois peut en causer la fermeture. Aussi, de nombreux Chinois, en particulier ceux nés peu avant ou après 1989, n’ont qu’une très vague idée de ce qui s’est passé. Les rares ouvrages d’historiens Chinois sur le sujet ont été publiés dans la région spéciale de Hong Kong (autonome jusqu’en 1997), et sont difficilement accessibles, et les sources occidentales sur le sujet ne sont pas diffusées en Chine. En mai 2009, les mémoires posthumes de Zhao Ziyang sont publiées. Ce dernier y désigne Deng Xiaoping comme le principal responsable de la répression des manifestations de la place Tian’anmen.

Deng Xiaoping s’éteint le 19 février 1997, à l’âge de 92 ans, des suites d’une infection aux poumons et de la maladie de Parkinson.

On lui rendit un grand hommage.

Le Gouvernement Central le décrivit comme un

«Grand Marxiste, un Grand Révolutionnaire du Prolétariat, un homme d’état, militaire, diplomate, un des plus grands dirigeants du Parti Communiste Chinois, de l’Armée de Libération Populaire et de la République Populaire de Chine, le Grand Architecte de l’ouverture et la construction moderne de la Chine, le fondateur de la théorie de Deng Xiaoping».

Les drapeaux restèrent en berne pendant plus d’une semaine. Deng fut incinéré et ses cendres dispersées en mer, selon ses volontés.

De nombreux dirigeants étrangers lui rendirent hommage. Ainsi, le président Jacques Chirac écrivit au président Chinois Jiang Zemin, «Deng Xiaoping restera dans l’histoire comme le principal artisan des transformations que la Chine connaît depuis près de vingt ans, et dont j’ai pu mesurer l’ampleur lors de mes voyages en 1978 et en 1991». Kofi Annan appelle la communauté internationale à se souvenir de Deng comme le «principal architecte de la modernisation de la Chine et de son formidable développement économique». John Major, alors Premier Ministre de la Grande-Bretagne, souligne le rôle majeur qu’a tenu Deng Xiaoping lors du retour de Hong Kong à la République populaire de Chine. Le président de la République de Chine (Taïwan) présenta ses condoléances. Le 14e Dalaï Lama exprima lui aussi ses regrets, déclarant qu’il «prie pour qu’il ait une bonne réincarnation, et souhaite offrir ses condoléances aux membres de sa famille. Ayant rencontré Deng Xiaoping à plusieurs reprises, je le connaissais comme quelqu’un ayant une forte personnalité, qui finissait ce qu’il avait commencé».

Tien’anmen en 1989

{youtube}k-TaW6BKOOM{/youtube}

Ainsi se termine cette série sur la Chine qui m’a beaucoup appris, et qui m’a montré beaucoup plus que celui de l’URSS le vrai communisme, peut être par ce que la Chine est un pays hors des autres à la fois par ses mœurs que par son écriture ou tout est dans le trait. Ce pays immense soumis à l’esclavagisme d’une population la plus importante du monde pour une idéologie communiste qui finalement après avoir fait des millions de morts se tourne vers le capitalisme. Le pays de la lutte sans merci de ses dirigeants pour le pouvoir que ce soit au cours des Empires anciens ou au XXème siècle. Quelle désillusion pour tous ceux qui prône cette doctrine. Ce grand peuple qui a tant souffert se tourne maintenant vers une économie de marché qui nous perturbe et menace notre économie par les bas coûts de sa main d’œuvre. Mais, il lui reste à s’ouvrir encore pour la libre expression, le droit de critiquer et de permettre l’émergence de nouveaux partis politiques, signes d’une liberté.

7 réflexions sur « La république populaire de Chine l’après Mao Zedong, suite 4 »

  1. BONJOUR NIDOLGA!
    [b]Je m’interroge sur ce Deng et son implication dans la conspiration des illuminati,
    sachant que Jimmy Carter faisait partie du BOHEMIAN CLUB.[/b]
    [i][b]Deng Xiaoping revient au pouvoir sans y être tout à fait et le nouveau Premier Ministre Hua le critique, mais devant les pressions des militaires de l’Armée populaire de libération, et à l’issue de tractations confuses, Deng Xiaoping est réhabilité au Comité central le 21 janvier 1977. Il reprend les fonctions de vice-président du Comité central, de membre de la commission du Bureau Politique, de premier vice-président de la commission des affaires militaires du Parti et de chef de l’état-major de l’Armée populaire de libération. Hua s’efface ainsi progressivement au profit de Deng. En décembre 1978, Deng Xiaoping l’emporte sur Hua lors du plénum du Comité central. Il nomme d’ailleurs le secrétaire général du parti au Sichuan Zhao Ziyang, puis au bureau politique en 1979, puis au poste de premier ministre.
    Il aurait autorisé les États-Unis à installer une base servant au renseignement d’origine électromagnétique, SIGINT, «signals intelligence» en Chine, afin d’écouter l’URSS[/b][/i]

  2. [b]Veritas[/b] bonjour,

    Enfin un commentaire de toi sur cette série Chine.

    Et bien, je me suis posée cette question aussi, et je n’ai rien trouvé.

    Il faut que tu saches que cette période historique a été masquée par les dirigeants Chinois, mais ta question est pertinente, étant donné les éloges après sa mort, alors qu’il est le principal artisan du massacre de Tien’anmen.

    Bien à toi,

    Anido.

  3. Merci pour cette serie tres interessante qui m’a beaucoup appris!

    je n’ai jamais considéré les Chinois maoistes comme des communistes, peu etre conditionnée par Malraux et mes profs (dans les années 70, tout le monde interllectuel ne jurait que par la chine).

    Je trouve le procès des pays occidentaux contre ce pays trop exagéré; ils se developpent malgré nous 😀 😀 😉 😉 😉

    comme ailleurs il y a du bon et du pire, helas amplifié par le fait qu’ils sont plus d’un milliard

    cordialement

  4. [b]AgnesB[/b] bonsoir,

    Merci pour votre passage, et heureux que cette série vous ait appris un peu plus sur la Chine ou j’ai été bien seul.

    Bien à vous,

    Anido

Les commentaires sont fermés.