La Libye, les Libyens en pleine débâcle !

 

Ne pas dire toute la vérité d’un bloc mais plutôt l’instiller à faibles doses afin de rendre pour certains, un peu moins amère la pilule à avaler, semble être la méthode utilisée par le groupe des bienfaiteurs en action pour la démocratisation de la Libye.
Partis pour juste protéger les populations victimes de la violence de leur propre dirigeant, voilà qu’à l’unanimité à la conférence de Londres prévu à cet effet, les partenaires se sont accordés sur la nécessité de déloger Mouammar al Kadhafi oubliant au passage leurs récents propos à ce sujet. De plus, l’élaboration d’un éventuel plan visant son exil serait à l’étude et s’avèrerait bien laborieux du fait de l’attachement scrupuleux de ces bonnes âmes au statut de Rome, texte fondateur de la Cour pénale internationale, lequel prohibe toute immunité. 
S’en tenir exclusivement à la stricte application de la résolutions 1973 du conseil de sécurité de l’ONU prévoyant une zone d’exclusion aérienne, un embargo sur la livraison d’armes relèverait de l’utopie et le chef de la diplomatie française Alain Juppé n’y va pas par quatre chemins pour révéler ses intentions de convaincre ses alliés de son vif souhait  de fournir une aide militaire aux rebelles. Après tout, une résolution  est aisément contournable avec un peu d’exégèse approfondie et subtile même si le secrétaire général de l’Otan Fogh Rasmussen, même si Moscou et l’Italie semblent s’en offusquer ! Cela s’appelle de surcroît, protéger la population ou plutôt une partie de la population !
A cet égard, le cheminement des évènements ne semblent pas présager d’un dénouement rapide et il convient de s’interroger sur le bien-fondé de cette intervention militaire à caractère dit humanitaire. Même si Alain Juppé claironne son optimisme face aux quelques malheureuses défections, sur le terrain pendant que reculent les rebelles vers l’est du pays, l’avancée des forces pro-Kadhafistes vers Brega, Ras Lanouf se fait fulgurante.
A se demander si étant célèbre pour ses actes calamiteux tournés vers le monde extérieur, le colonel aurait vraiment perpétré un génocide à Benghazi contre sa propre population comme nous l’ont fait croire les médias en nous abreuvant d’ informations issues d’un même type d’échantillons, assortis de cas particuliers susceptibles de les illustrer.
Des voix pourtant très fortes se sont élevées condamnant la barbarie de cette opération de coalition contre la Libye : venus de Biélorussie, de Russie, d’Ukraine et d’ailleurs, des femmes, des hommes, résidents libyens en appellent au travers d’une lettre ouverte, à Medvedev, à Poutine, pour s’opposer à ce génocide commis contre un pays souverain. Témoins des affres des bombardements, ils racontent la détresse des innocentes victimes d’agressions sauvages, étant objets d’innombrables bavures faisant partie intégrante des lois de la guerre et ne les épargnant pas. Puis la pluie de bombes, de missiles qui poursuit inexorablement sa mission ravageuse ne faisant nulle distinction entre militaires et civils…Sans cette ingérence, les choses se seraient sans doute calmées,  laissant peut-être aux Libyens le temps de mieux mûrir leur projet ambitieux, pour cueillir le moment propice venu, un soulèvement fertile ?
N’est-ce pas affligeant de se lancer dans une entreprise faite de sang et de larmes, avec au préalable un refus catégorique par le Conseil de Sécurité des Nations Unies, de l’entrée en Libye  aux délégués du Conseil de l’Union africaine venus négocier une solution pacifique ? Le jeu en vaut-il la chandelle, vraiment ?
A quoi sert aujourd’hui cette lettre ouverte adressée à la Russie qui n’a même pas usé de son droit de veto lors du vote de la résolution 1973 du Conseil de sécurité de l’ONU autorisant l’usage de la force en Libye en vue de protéger la population civile, toute la population civile ? Une résolution qui légitime l’ingérence, "le droit qu’on donne à des Etats d’envoyer des soldats dans un autre Etat pour aller tuer des pauvres innocents chez eux, dans leur propre pays, dans leur propre village, sur leur propre natte".

17 réflexions sur « La Libye, les Libyens en pleine débâcle ! »

  1. Les Russes aimeraient qu’on leur fiche la paix lorsqu’ils massacrent les Tchéthènes ou les Géorgiens.
    De plus, La Libye est un symbole dans cette partie du monde.
    Le but est de « tuer » la révolution, les autres dirigeants n’ont pas intérêt à voir les révolutions se propager. FQFD.
    Debout les descendants de 1789.
    😉

  2. 1789 , y’en a pas mal qui ont été raccourcis
    grace à l’esprit des « LUMIERES » de Robespierre ,
    qui n’est pas l’Esprit de la grâce !!!!!

  3. @Veritas, autre temps mais pas autres moeurs, certains sont raccourcis quand même.
    Faut-il n’avoir de courage que dans les paroles ?

  4. Même si les Irakiens n’aimaient pas Saddam, aujourdh’ui par rapport à ce qu’ils endurent, ils regrettent cette période de leur vie.
    Ce qui attend la Libye ne pourrait être qu’une malheureuse irakisation.

    « Les autres dirigeants n’ont pas intérêt à voir les révolutions se propager ». Avec la politique des deux poids, deux mesures, certains ne craignent rien, par exemple le Bahrein et pourtant les bases militaires américaines y sont bien présentes !

    « Debout les descendants de 1789 », charité bien ordonnée commence par soi-même et les problèmes ne manquent pas sur place.

  5. Mmmm… Connaissant un peu les pays de l’ex-bloc soviétique, je ne dirais pas que leurs habitants « [i]regrettent cette période de leur vie[/i] ». Et je ne saurais me prononcer pour la majorité des Irakiennes et Irakiens.
    La capacité d’oubli est fantastique.
    Question atrocités, tant des (et non les) « pro-Benghazi » que les « pro-Tripoli » (on va les appeler ainsi) ne sont pas en reste : on torture, on mutile des cadavres des deux côtés.
    Je comprends votre point de vue, Coquelicot, que je ne partage pas tout à fait car je ne me suis pas fondé une opinion définitive, même à court terme. La majorité des Lybiennes et des Lybiens ne savent pas davantage que nous ce dans quoi nous nous retrouvons embarqués.

  6. Jef Tombeur,
    En tant que Libanaise et connaissant bien la région, il est très fréquent d’entendre dire par les populations dans leur majorité que l’ingérence occidentale surtout en Irak nous a conduits du paradis à l’enfer.(façon de parler hyperbolique.)
    Quant à ma réponse à aliciabx qui peut paraître très affirmative, mon but était tout simplement de lui dire que je ne partage pas ses convictions et déplore tout recours à la brutalité pour la résolution de conflits car souvent contre productif. Loin de moi la prétention de savoir exactement « dans quoi nous nous retrouvons embarqués » mais je crains l’installation dans la durée des hostilités entre diverses tribus.
    Si vous Jef Tombeur ne savez pas alors moi, il ne me reste même plus une miette !

    MERCI de votre passage

  7. Comparez les invasions en Iraq et ce qui en a découlé avec la Libye ne me paraît pas approprié.
    Ce n’était déjà pas les mêmes acteurs du côté intervention extérieure ni les mêmes motifs.
    Les Etats Unis et leurs alliés lorsqu’ils ont attaqué l’Iraq, c’était à la suite du 11 septembre 2001. Le prétexte trouvé a été que l’Irak menaçait les USA et d’autres pays car cet état n’avait pas respecté les embargos imposés et avait soit-disant reconstruit un armement nucléaire et chimique. Il y avait certainement des comptes à régler entre SADDAM HUSSEIN et LES AMERICAINS notamment Bush et compagnie. Et cela évitait que le peuple américain ne se pose trop de questions : tous unis contre l’axe du mal.
    Wikipédia :
    « Depuis l’arrivée au pouvoir de Saddam Hussein en 1979, l’Irak a connu trois guerres meurtrières, des répressions sanglantes dont celles des Kurdes et des chiites et plus de dix ans d’embargo. (ce n’était donc pas un paradis pour tout le monde déjà). Ce régime, en dépit de son caractère dictatorial semble avoir été très populaire chez la majorité des sunnites, traditionnellement nationalistes mais minoritaires au sein de la population irakienne. »

    Personnellement, j’étais comme bon nombre de français contre l’invasion des USA en Iraq. Et le refus de nous impliquer s’est révélé la bonne réponse à l’époque car il était clair que les arguments avancés pour justifier cette guerre étaient fallacieux. Je me souviens du discours de Villepin aux NU (j’étais aux USA), et j’étais fière que nous ayons eu le courage de nous opposer.

    En Lybie, je suis pour l’intervention mais ne l’aurais pas accepté de la part des USA seuls. Là, à la suite de ce qui s’est passé en Tunisie et en Egypte, ce peuple de Libye ou du moins une partie de ce peuple s’est révolté. On ne peut nier ce fait. On ne peut nier que KADHAFI (contrairement à MOUBARAK et BEN ALI) est un fou furieux entouré d’un gang prêt à tout pour garder le pouvoir. Il a la main mise sur l’armée, une légion de mercenaires et l’armement qui est énorme et a donc contre la partie de son peuple qui se révolte la possibilité de le massacrer comme bon lui semble. Par ailleurs, il reçoit des soutiens étrangers (certainement l’Algérie et Israël, au moins – je ne serais pas surprise que l’Arabie Saoudite joue un double jeu) qui ne veulent pas qu’un autre état bascule dans sinon la démocratie, du moins un changement de régime. Les révoltés ont été clairs et ne voulaient tout d’abord aucune intervention étrangère. Ce qui a été respecté. La sympathie extérieure penche de leur côté car leur combat semble justifier, et la folie de leur dirigeant a dépassé toute limite.
    (voir 2e partie à la suite)

  8. (suite)
    Il est certain qu’il y a toujours une partie de la population qui préfère que rien ne bouge et qui soit profite du système, soit fait le dos rond par crainte du pire. (ce qui se justifie).
    A partir du moment où ces révoltés ont commencé à perdre pieds et (il est certain qu’ils se seraient fait massacrés jusqu’au dernier), ils ont fait appel à une aide extérieure.

    Imaginez votre voisin avec lequel vous n’avez aucun lien profond particulier en train de se noyer, vous appelant au secours, car il a été attaqué par un ennemi qui vous déteste également. (c’est très simpliste, pardon). Que faites vous ? l’aider sachant que cela vous sera reproché et que vous risquez d’avoir des répercussions en retour ou tournez la tête et attendez ?
    Nous sommes je pense dans l’obligation d’intervenir même si les raisons ne sont pas les mêmes pour tout le monde, même si il y a des arrière-pensées de toutes sortes, et mêmes si les conséquences futures sont viciées, même si nous avons fait de grossières erreurs dans le passé (par exemple : le traitement d’un tel dictateur par la France ; nos valses hésitation pour les mouvement en Tunisie et Egypte pour parler des plus récentes grossières erreurs).

    Avant c’était un massacre, maintenant c’est une guerre.
    On ne peut prédire si la Libye « s’en sortira » rapidement et facilement. Je le souhaite de tout mon coeur et espère que nous n’aurons jamais à regretter cette intervention. Mais à ce jour, je ne vois aucune autre alternative. Dans ce cas, je ne me sens pas française ou quoi que ce soit, je me sens faire partie de l’humanité qui a l’obligation de porter secours, ne pas être indifférent. C’est naïf, utopique, dangereux, je sais.

  9. Les motifs mensongers inventés pour justifier l’intervention en Irak nous ont rendus méfiants : armes chimiques, nucléaires, armée irakienne puissante, axe du mal, etc et ont laissé des traces indélébiles chez nous classés non loin de l’axe du mal !
    Nombreux comme moi, sont ceux qui détestaient Saddam et qui n’ont pas du tout apprécié ni sa sortie du trou ni tout ce qui va avec.(ne pas reprocher à Saddam l’embargo mais plutôt à ceux qui l’ont infligé au peuple d’Irak). Tout étant relatif, les génocides vécus sous Saddam, de courte durée, n’ont rien à voir avec ce qui s’y passe actuellement.
    Même si les motifs sont différents et que les acteurs ne sont pas tout à fait les mêmes, le but affiché est de porter secours à une population d’où mon empressement à faire un petit parallèle entre ces deux interventions…
    Ce n’est pas moi qui vous dirai que Kadhafi n’est pas le pire des tyrans, ni que le devoir des Hommes n’est pas de se battre pour faire valoir leurs droits mais est-ce vraiment la bonne méthode. J’ai malheureusement du mal à y croire quand ces mêmes bienfaiteurs demeurent insensibles à d’autres drames qui mériteraient la même bienveillance.
    Peut-être que je suis devenue parano, j’en sais rien mais je n’arrive pas à partager votre confiance, ni celle d’aliciabx qui part d’une bonne intention.
    cordialement

  10. Pour Coquelicot :
    Je ne vous savais pas Libanaise. On ne va pas remonter à la proximité des Phéniciens avec la Libye : expliquer la politique marseillaise de la sorte serait totalement ridicule, n’est-il pas ?
    Je nourris la plus haute estime pour certain·e·s intellectuel·le·s ou observatrices ou simples curieux (de tout) du Liban qui, du fait d’un cosmopolitisme (ici, valeur positive) particulier, tant du fait de la multiplicité des cultures locales que du rayonnement des Libanais de par le monde, ont développé une sensibilité, une acuité d’observation rare.
    Je n’en estime pas moins votre sentiment à propos du tribalisme libyen quelque peu « pollué » (au sens où on l’entend en biochimie quand on se livre à des recherches, tests et expérience) par ce que vous pouvez vivre au Liban. Ce n’est pas tout à fait transposable. J’admets des similitudes patentes et ne dénie absolument pas que l’avenir pourrait vous donner raison.
    Nihile reflète un sentiment prédominant, pas du tout naïf en fait. « On » (nous) veut croire que préserver l’existence de gens de bonne volonté n’est pas tout à fait vain, nous pensons d’abord à ceux qui nous ressemblent, soit à des personnes éprises de justice et d’équité, en espérant que ce que d’autres que nous mettent en œuvre n’est pas un futur enfer pavé de bonnes intentions initiales (ou d’autres visées qui nous sont étrangères).

  11. Le génocide kurde (surtout connu sous le nom d’Anfal) ordonné par le régime irakien de Saddam Hussein a lieu de février à septembre 1988, conduisant à l’élimination de plus de 180 000 civils kurdes. L’épisode le plus célèbre de ce génocide est le bombardement aux gaz chimiques de la ville kurde d’Halabja le 16 mars 1988.

    Les morts de civils en Iraq tués par suite de violence depuis 2003 jusqu’en 2011 : 110.000 (il ne s’agit là que d’un décompte fait sur les cas déclarés dans les médias)
    [url]http://www.iraqbodycount.org/[/url]

    Une autre estimation arrive à plus de 655.000 en 2006 en considérant en plus des morts directes celles dues aux conséquences de la guerre (malnutrition, maladies, blessures, etc). La méthodologie (chercheurs d’un institut américain) a été de se baser sur 1.849 familles et d’extrapoler. (méthodologie utilisée d’une manière standard dans les pays développés pour évaluer le nombre de décès ou personnes atteintes en cas de HIV ou autres épidémies).
    (chiffres contestés par Bush à l’époque et par le gouvernement irakien)

  12. Merci pour eux Jef Tombeur !
    L’anologie que vous faîtes entre la pollution découlant des clivages entre les partis libanais et celle du tribalisme libyen largement plus complexe ramène à l’évidence et tend à rendre pessimiste quant à la suite des évènements !
    D’un vécu à un autre l’approche d’un même problème varie complètement explique le scepticisme des uns et la confiance des autres.
    Votre passage, un grand plaisir !

  13. NIHILE Personne ne dit le contraire et tous ces abominables génocides ne peuvent rien justifier, d’ailleurs l’intervention a conduit à bien pire !
    Bonne journée !

  14. Chère Coquelicot : oui je sais que cela ne change rien. Je voulais juste rappeler certains chiffres (qui sont certainement loin de la réalité) pour « recadrer » des points de notre discussion.

  15. Berlin : « Il n’ya pas de solution militaire en Libye » !
    on se croirait il y a 70 ans !!!!!
    Ja, mein Marschall !

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