Damned, refait par la police… et du sucre en poudre !

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Une logique policière veut que, si on place un sachet de sucre en poudre dans la poche de n’importe qui, il finira par vous avouer le vol d’un fruit à l’étalage… Mais en Thaïlande, comme ailleurs, et naguère dans l’Espagne du generalissimo Francisco Franco, le sucre en poudre sert surtout à se sucrer, entre policiers, comme en témoigne la mésaventure survenue à un touriste français et relatée par Europe nº 1.

Pour la mésaventure survenue à un touriste français qui se voit tendre un sachet contenant du haschich et devant ensuite verser 1 500 euros à des policiers thaïlandais, vous pouvez vous reporter directement à la source, l’article « Le séjour d’un Français vire au cauchemar » se trouve sur le site d’Europe nº 1. Remarquez au passage que le petit « º » est bien le pendant masculin du « ª » de numera, et non pas le degré (°) que je vois trop souvent et qui me blesse davantage le regard que la vue d’un policier ripou (on s’habitue à presque tout…).

Mais tout d’abord, un petit « cours » de journalisme tel qu’on ne vous l’enseignera jamais dans les écoles de « journalisme ». Un jour, j’enquête sur le trafic de drogue dans une grande ville de l’Est de la France proche de Paris. Et comme il était hors de question de bidonner ou de photographier l’un de mes informateurs ou de recueillir les témoignages « conformes à l’éthique journalistique » de policiers, encore moins de publier les photos des lieux où étaient recueillis les témoignages (anciens ou potentiels annonceurs), je reviens sans photo. Gravissime, cela. Le texte est là pour entourer la photo, qui seule fait la gloire du métier de secrétaire de rédaction, soit de décideuse ou décideur de ce qui fait un journal, de l’information, &c. Or donc, un photographe du service photo s’est fait un garot, on est allé à la pharmacie acheter une seringue, à l’annexe demander du sirop de grenadine, et hop, une belle trois cols carrée, l’acte journalistique (comme on dit « l’acte architectural ») était accompli !

Voyez à présent l’illustration ci-dessus. C’est un montage d’éléments chapardés sur l’Internet, non crédités du fameux « DR » (droits réservés et non « de la rédaction » comme trop de « consœurs » et « confrères » se l’imaginent), ce qui est très vilain-vilain et pas bien du tout. Mais c’est un peu moins tartignole que la fameuse photo Corbis d’une cellule de la prison-musée d’Alcatraz que certaines et certains « journalistes » rémunéré·e·s  aux tarifs syndicaux nous ressortent à chaque suicide survenu dans une prison française. Et c’est moins ridicule que la feuille de cannabis balancée plein cadre pour illustrer la même information sur un site du groupe La Voix de son Minc que je ne citerai – charitablement et confraternellement – pas ici. Une photo, une illustration, une infographie doit être le complément du texte, et non l’inverse, et elle se doit d’être informative. On verra plus loin qu’avec l’illustration ci-dessus, c’est bien le cas. Mais digressons encore… Contrairement à ce qu’on enseigne à présent, le journalisme n’est pas fait par des fournisseurs de contenus qui apportent aux « journalistes » (les seul·e·s sèches et secs de rédac’ et la rédaction en chef) de quoi mettre dans l’emballage vendu aux actionnaires et aux annonceurs. Le journalisme consiste à envoyer des gens voir et entendre et surtout tenter de comprendre pour faire comprendre. C’est bien pour cela d’ailleurs que j’ai été viré de partout (sauf du titre que j’avais repris et qui n’a plus eu l’heur de plaire aux annonceurs, j’aurais dû m’en douter…).

Hors donc, que voyons-nous sur cette illustration un peu moins passe-partout que le point rouge de Google Maps marquant l’emplacement de l’île de Koh Phangan ? Elle est située au sud-est de l’île Tao et au nord de l’île Samui, et Wikipedia vous l’écrit Ko Pha Ngan ou Koh Phangan, et mentionne la Full Moon Party, fête techno qui tient éveillé une bonne partie de l’île avec l’assentiment de la police locale et surtout des maires ou édiles de Thong Sala (vers Chaloklum) ou Haad Rin (l’autre emplacement d’un poste de police) et autres lieux-dits locaux. On pourrait soutirer à tout le monde des amendes pour tapage nocturne, mais cela déplairait aux commerçants du cru. Tout comme, pour ne pas déplaire à « notre ami le roi » (du Maroc), aux chefs de guerre afghans nos alliés, aux seigneurs de la came colombienne nos fournisseurs de fonds, on ne va surtout pas acheter aux producteurs toute la production et licencier tous ces bels et bons policiers qui coutent largement plus cher à rétribuer. Non, on va faire des opérations bidonnées et nos amis vont nous lâcher quelques cargaisons via des informateurs fiables. Là, vous avez un montage montrant la carte de l’Opération Coucher de Soleil (Sunset, ou extinction des feux chauffant la came). Un truc fait pour épater la galerie et déployer 200 militaires de l’armée de l’air et des policiers sur 15 sites de l’île de Samui. Moteur ! C’est bon, coco ? Non, attends, j’ai encore besoin d’un pano pour le montage, sinon, c’est dans la boîte !
L’autre illustration, c’est ce qu’on voit sur les plages de Ko Phangan (remarquez que j’utilise les deux graphies : c’est pour les moteurs de recherche et mieux placer cet article de C4N par rapport à d’autres de la concurrence). Soit une interdiction de filmer ou de photographier des sites parfaitement détaillés par les photos satellitaires et autres de Google et Microsoft.

 

Mais cette interdiction a son utilité. Lorsque vous rendez le véhicule loué pour faire le tour de l’île, on vous assure qu’on vous a photographié en train de photographier ce panneau ou ce qui l’entoure.  À la tête du client, cela peut coûter entre 300 et mille euros. Le loueur vous le fait tant qu’à faire en fin de séjour (il a ses informateurs dans les hôtels, chez les loueurs de bungaloos ou bungalows ou bengalos, c’est selon… voir supra au sujet de la toponymie et des moteurs de recherche). Pas la peine d’appeler la police. Elle ne va pas venir de Ko (ou Kho ou Koh, bon, allez, cela suffit) Samui. Là où est localisée la Tourist Police qui fait défaut sur Phangan.

Or donc, comme j’en vois devant leur écran qui n’ont pas suivi le lien vers le site d’Europe nº 1, je résume. Un certain Thierry se voit tendre un sachet par un gamin. Hop, des policiers de Ko Phangan surviennent opportunément. Et surprise, le sachet contient de la beuh, du hasch, ou du Viandox®, Liebig®, du Kub®, peu importe. Franchement, perso, je n’ai rien vu, je n’y étais pas, le 9 juillet dernier, auprès de ce  Langonais ou Lengonois, bref de ce Girondin ou Aquitain qu’on me dit être un certain Thierry, 43 ans, époux et père d’un ado de 14 ans. Direction l’un des postes de police de l’île (Thong Sala ? Haad Rin ? Pierre de Cossette ou celui qui a validé le montage de la bande sonore, et qui sait mieux que nous-mêmes quelles informations nous intéressent, s’en contrefout). Où on lui demande 20 000 pour retrouver Madame et le fiston. Finalement, la police locale se contentera de 1 500 euros. Notez que, si vous avez l’air du routard peinard, cela peut se négocier moins cher. Mais un gars qui peut venir avec femme et enfant sur Phangan peut bien cracher cette somme. D’ailleurs, on sait fort bien s’il a une Master Card, une Visa, une Discover, une Diners Club, Premier, Gold, Platinum, Comercard business, Amex, &c. Tiens, je vous mettrai bien une petite illustration d’une JBS (Bank Ja Tim), ou une JCB (c’est japonais), ou une Nets histoire de vous montrer autre chose qu’une Visa ou une EuroCard dont vous n’avez strictement rien à faire mais qu’on vous collerait ailleurs, car niais que vous êtes, vous n’avez jamais vu une carte Visa, c’est sûr de sûr, et là, tant de lignes sans respiration, sans illustration… Quel gâchis !

Au passage… Si vous allez souvent à l’étranger et que vous ne voulez pas payer l’inutile assurance ou assistance supplémentaire qu’on vous propose systématiquement… Comparez donc les clauses de couverture des Visa et des Master Card. Aux dernières petites lignes écrites en tout petits caractères, avantage à la Master Card…

Le coup du sachet de came ou du simple de Carla Bruni (propagande pour la consommation, de came et de presse pipeule, cela va chercher loin, s’pas ?) qu’on vous colle dans les mains ou vous glisse dans la poche me remémore deux anecdotes.

C’était du temps où Régis Debray était en prison à Camiri, en Bolivie. Soit circa 1967 et avant 1972. Et voici ce que me narrait un compagnon de pouce (hitch hiking, auto-stop). Il avait alors dans les dix-sept ou dix-huit ans et pouçait en Bolivie. Une Jeep™ de la police s’arrête. Un ‘pitaine en descend.
¿Frances?

¡Si!
Ah, Frances… ¿Y conoces a Regis Debray?

– Euh (en français dans le texte, Ndt), si

Ah, ha-ha-ah-ah… (en Alexandre Dumas dans le texte, s’exclama l’hidalgo, Ndt)

Conoces à Regis Debray…

Et ce furent quelques semaines de détention. Mon compagnon de route avait vaguement entendu parler d’un certain Guevara et lu quelque part qu’un dénommé Debray, Régis, faisait parler de lui. Mais c’est comme l’augmentation des gardes à vue en France. On fait du chiffre. On obtient ainsi de l’avancement. Bolivie, France, mêmes combats contre la criminalité organisée, mêmes types de magistrature…

Bon, je vais m’en griller plusieurs (des grains de café), et je vous reviens avec l’histoire du bonneteau à la station-service de la sortie d’Arad, ville roumaine frontalière de la Hongrie, et le rôle de la police d’Arad qui vaut bien celle du commissariat de La Roquette du temps où on retrouvait  l’un de ses commissaires abattu dans une aire de stationnement souterraine. France, Roumanie, mêmes types de magistratures, et de forces de l’ordre…

La morale fontanellaire (non point du sieur Janot de Château-Thierry, mais de celle qui fait qu’on murit et clot sa fontanelle mentale à tout âge) m’en fut livré par une mienne connaissance, ancien colonel, ancien dirigeant de la police territoriale roumaine, et qui fut viré au plus vite et mis à la retraite d’office. Mais comme il avait des petits carnets encore mieux planqués que ceux d’Yves Bertrand (ancien directeur des RG français, contre lequel un Sarközy, Nicolas, a porté plainte pour diffamation, comme quoi, entre France et Roumanie, il s’agit bien des mêmes), il est encore en vie. Comme moi-même.

Or donc, je narre à ce parfait honnête homme (il en reste, dans le civil… à présent) l’anecdote authentique qui suit (j’ai plein de témoins, tout un car Atlassib, plein de gens ayant payé en liquidités car Atlassib n’accepte ni les chèques, ni les cartes bancaires, en pleine connaissance de tout un chacun, comme quoi, services fiscaux français et roumains, c’est bien tout un…).

Venant de  Széged (Hongrie), on fait de l’essence peu avant Arad et un long  arrêt pipi et transfert de bagages et voyageurs à la gare routière d’Arad. Et puis, peu avant la sortie d’Arad, nouvel arrêt pipi non sollicité dans une station-service. Deux femmes, une mère et sa grande fille, qui avaient économisé patiemment près de 2 000 euros en faisant des ménages en France, descendent comme presque nous toutes et tous. Survient immédiatement un trio de joueurs de bonneteau. Elles s’y laissent prendre. On les retrouve en larmes, ayant perdu plus de 1 500 euros en quelques tours de mains (au sens propre). Le trio a disparu. On appelle illico la police. Et hop ! Miracle, une patrouille survient pronto-pronto…

« Eh, évidemment, les policiers sont venus vérifier quelles sommes avaient exactement empoché leurs partenaires, » me conclut cet ancien officier supérieur de la police Roumaine.

Bien évidemment, toute ressemblance entre la Sarközye et la Roumanie est le fruit du pur hasard. L’anecdote est tout à fait réelle, mais ce n’est qu’une anecdote, un fait isolé, pas du tout significatif. Les autres personnages et situations doivent être, absolument, purement fictifs, et toute similitude entre des personnes encore existantes ou ayant existé du côté de La Roquette, par exemple, ne saurait être que fortuite. Ce n’est certes pas en Sarközye qu’un racket ou des extorsions de fonds aux dépens du Trésor public, de commerçants, pourraient exister, ce n’est pas en Sarközye que l’intimidation de témoins et d’employé·e·s de presse pourrait survenir, ce n’est pas en Sarközye que la magistrature « debout » est employée pour faire pression sur qui que ce soit, et surtout pas un ancien directeur des Renseignements généraux, et ce n’est certes pas en Sarközye qu’on abuse des gardes à vue. D’ailleurs, en Sarközye, on n’a pas besoin de tels agissements : on a des radars routiers concédés à des sociétés au-dessus de tout soupçon. Et une presse constamment aux aguets, qui déjoue toutes les tentatives de manipulations…

Auteur/autrice : Jef Tombeur

Longtemps "jack of all trades", toujours grand voyageur. Réside principalement à Paris (Xe), fréquemment ailleurs (à présent, en Europe seulement). A pratiqué le journalisme plus de sept lustres (toutes périodicités, tous postes en presse écrite), la traduction (ang.>fr. ; presse, littérature, docs techs), le transport routier (intl. et France), l'enseignement (typo, PAO, journalisme)... Congru en typo, féru d'orthotypographie. Blague favorite : – et on t'a dit que c'était drôle ? Eh bien, on t'aura menti !

Une réflexion sur « Damned, refait par la police… et du sucre en poudre ! »

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